L'exfiltration vers l'Espagne fin avril de Brahim Ghali pour y recevoir des soins de santé a provoqué l'ire de Rabat, laquelle réclame des poursuites judiciaires contre le dirigeant séparatiste accusé de crimes contre l'humanité. Le tribunal de l'Audience nationale espagnole a convoqué le chef du Polisario, Brahim Ghali, admis à l'hôpital San Pedro, à Logroño, pour témoigner mercredi 5 mai, selon des sources juridiques qui se sont confiées à l'agence EFE, qui confirment une information annoncée le 2 mai. Un juge d'instruction de l'Audience nationale, juridiction siégeant à Madrid et chargée des affaires complexes, a été saisi dans le cadre de cette affaire et a ordonné cette audition. «Brahim Ghali est convoqué par le juge Santiago Pedraz Gómez pour témoigner en tant que prévenu dans des crimes de "génocide et torture" perpétrés contre la population dissidente sahraouie qui s'est réfugiée à Tindouf (Algérie)» rapporte la même source. Le gouvernement marocain a vertement critiqué les autorités espagnoles après l'entrée clandestine sur le territoire du pays du chef du Front Polisario. «Le Maroc exprime sa déception après cet acte contraire à l'esprit de partenariat et de bon voisinage, lié à une question fondamentale pour le peuple marocain et ses différentes composantes (la question du Sahara)», lit-on dans le communiqué du ministère du Affaires étrangères marocaines. La décision de l'Espagne d'accueillir Ghali «soulève de grands malentendus» et «des questions légitimes»: «Pourquoi le soi-disant chef séparatiste a-t-il été admis en Espagne secrètement et avec un faux passeport ? Pourquoi l'Espagne a-t-elle jugé utile de ne pas avertir le Maroc ? Pourquoi a-t-elle choisi d'être admis sous une fausse identité? Pourquoi la justice espagnole n'a-t-elle toujours pas réagi aux multiples plaintes présentées par les victimes (contre Ghali) ?» se sont interrogées des sources marocaines. L'Association canarienne des victimes du terrorisme (Acavite), a demandé aux autorités espagnoles «d'interpeller immédiatement» Ghali pour «assassinats de travailleurs canariens». Le chef séparatiste est décrit comme étant «l'auteur matériel et intellectuel de certains crimes et celui qui a ordonné les mitrailleuses, les assassinats, les enlèvements massifs et les disparitions des équipages de haute mer des marins canariens» entre 1973 et 1986. Une autre ONG, l'Association sahraouie pour la défense des droits de l'homme, a pris langue avec le parquet de la haute-cour nationale afin de convoquer Ghali pour témoigner. À la suite d'une plainte de cette association contre le dirigeant du Polisario, la Cour nationale a ouvert une enquête en 2012 contre Ghali pour «génocide, torture et meurtre», mais il n'a jamais pu être entendu. La plainte dénonçait les exactions que le Front Polisario avait perpétrées à Tindouf dans les années 80 contre des prisonniers de guerre et des citoyens sahraouis, en particulier ceux d'origine espagnole. Il est également accusé d'avoir «retenu contre leur gré des milliers de sahraouis dans lesdits camps» situés au sud-ouest d'Alger.