Des hommes armés ont tué plus de 100 personnes dans une attaque mercredi dans l'ouest de l'Éthiopie, a indiqué la Commission éthiopienne des droits de l'Homme (EHRC). Cet organisme indépendant, rattaché au gouvernement, a indiqué dans un communiqué que «plus de 100 personnes ont été tuées par des tirs perpétrés par des hommes armés», dans la région de Benishangul-Gumuz. La Commission a indiqué avoir reçu de la part de rescapés «des preuves photographiques inquiétantes» de cette attaque perpétrée avant l'aube sur des «habitants en train de dormir» dans la zone de Metekel et qui s'est poursuivie jusqu'à mercredi après-midi. Au moins 36 autres personnes ont été traitées pour des blessures, notamment par balles, dans un hôpital de Bulen, situé à environ 90 km du lieu de l'attaque, a précisé la Commission. «Outre les dommages infligés à la vie des gens et à leur corps, les cultures ont été incendiées. Une victime nous a dit avoir vu 18 incendies», a indiqué l'organisme dans son communiqué. Il n'y avait «ni police ni forces de sécurité» stationnées dans la zone à ce moment-là. Des forces armées avaient été envoyées dans la zone mardi pour calmer des tensions, mais elles étaient reparties peu après. Certaines des victimes de l'attaque ont indiqué qu'elles connaissaient les assaillants, a ajouté la Commission, précisant qu'une aide humanitaire serait envoyée dans la région pour aider les personnes déplacées et blessées. Attaques ethniques La région abrite des habitants des ethnies shinasha, oromo et amhara, selon la Commission. L'ethnie amhara est la deuxième plus nombreuse du pays. Cette attaque est la dernière d'une série sanglante ces derniers mois. En octobre, 12 civils avaient été tués dans la même région. Et la Commission éthiopienne des droits de l'Homme avait déjà rapporté la mort, le 25 septembre, de 15 civils, dans cette même zone de Metekel, qualifiant les violences d'«assassinats ciblés». Le premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a attribué en octobre les récentes violences dans l'ouest à des combattants entraînés au Soudan, et appelé Khartoum à stabiliser la région frontalière soudanaise du Nil-Bleu, où selon lui sont entraînés et armés ces combattants. Jusqu'ici les autorités d'Addis Abeba s'étaient peu exprimées sur les moteurs de la violence dans l'État de Benishangul-Gumuz, que des dirigeants de l'opposition ont attribuée à des facteurs ethniques. Des hommes politiques d'opposition, surtout issus de la communauté amahra, tirent depuis des semaines le signal d'alarme sur ce qu'ils qualifient de campagne ciblée menée par des milices ethniques gumuz contre les Amhara et les Agew vivant dans la zone de Metekel. Selon eux, plus de 150 civils ont péri dans ces attaques, des chiffres qui n'ont pu être confirmés de manière indépendante. Ces violences montrent que l'ouverture prônée par le premier ministre Abiy Ahmed a libéré des ambitions territoriales locales et d'anciens différends intercommunautaires, qui ont débouché sur des violences meurtrières dans de nombreuses régions du pays. Le premier ministre, prix Nobel de la paix en 2019, a par ailleurs lancé début novembre une offensive militaire dans la région dissidente du Tigré. Aucun bilan précis du conflit au Tigré n'est disponible, mais les combats ont poussé plus de 50 000 personnes à trouver refuge au Soudan voisin et en ont déplacé plus de 63 000 à l'intérieur de la région, selon l'ONU.