La délégation de l'Union européenne au Maroc a publié une note sur l'impact de la pandémie du coronavirus sur l'économie nationale et les mesures prises par le Maroc pour gérer la situation. L'activité économique du Maroc sera incontestablement impactée par le repli de l'économie européenne sachant que les échanges avec l'UE représentent plus de 58% des exportations marocaines. 59% du stock d'IDE, 70% des recettes touristiques et 69% des transferts des Marocains résidant à l'étranger (MRE). En tant qu'économie axée sur la consommation, le commerce et le tourisme, le Maroc pourrait connaître des pertes importantes en 2020. Jusqu'à présent, les principaux secteurs touchés sont le tourisme, l'automobile et le textile. Sur le plan de de la croissance, la note de la délégation européenne s'est basée sur de nouvelles données, à savoir la réunion trimestrielle du conseil d'administration de la Banque centrale marocaine, décidant de revoir à la baisse ses prévisions de croissance nationale pour 2020 de 3,8% à 2,3%. Pour le volet consommation et investissement, la note relève une hausse du taux de chômage suite au gel des activités des entreprises ainsi qu'aux mesures sanitaires prises comme le confinement. Une baisse de la consommation des ménages et de l'investissement devrait être attendue, prévient la note. Des risques d'approvisionnement au niveau du marché marocain en intrants importés et de baisse de la demande étrangère restent, néanmoins, envisageables. De plus, la crise pourrait impacter le commerce extérieur du Maroc qui représente 32% du PIB. Au niveau de la balance commerciale, un ralentissement des exportations reste aussi probable au vu de la perturbation des chaînes d'approvisionnement, de l'allongement des délais de traitement des dossiers et de la baisse de la demande étrangère adressée au Maroc. Le tourisme fait partie des secteurs qui paieront un lourd tribut dans cette crise sanitaire du covid-19. L'étude parle de la Confédération nationale du tourisme (CNT) qui a évalué l'impact de la crise covid-19 à 34,1 MMDH de perte en termes de chiffre d'affaires touristiques en 2020 et de 14 MMDH de perte en termes de chiffre d'affaires pour l'hôtellerie, pour une chute globale de près de 6 millions de touristes, qui occasionneront une perte totale de 11,6 millions de nuitées. Pas moins de 500.000 emplois et 8.500 entreprises seraient menacés, dont des entreprises d'hébergement touristiques classées, des entreprises de restauration touristique, des agences de voyages, des sociétés de transport touristique et des sociétés de location de voitures. La note de la délégation européenne cite également la banque CFG qui a estimé les effets d'une baisse des arrivées touristiques à 39% en 2020 et des nuitées à 30% par rapport à 2019, en supposant que la contre-performance des touristes étrangers serait partiellement compensée par la performance des touristes nationaux. Par ailleurs, le transport aérien souffre des mesures de précaution appliquées et de la baisse de la demande. L'étude rappelle, dans ce cadre, les estimations de l'Association internationale du transport aérien (IATA) qui évalue les pertes provoquées par le covid-19 d'une part à 4,9 millions de passagers en moins et un manque à gagner de 728 millions de dollars. Les transports routier et ferroviaire n'échappent pas à la crise avec l'interdiction, dans l'ensemble du pays, de la circulation des véhicules de transport de voyageurs depuis le 24 mars. Quant au transport international des marchandises, certains opérateurs mettent l'accent sur une hausse de prix variant entre 50% et 75% au niveau du transport routier, correspondant à un surplus variant entre 2.100 euros et 3.500 euros par livraison. Quant au secteur automobile, il est actuellement à l'arrêt suite aux décisions de Renault et de PSA, locomotives du secteur automobile au Maroc, de suspendre temporairement leur activité dans le pays depuis le 19 mars. Une suspension qui pourrait avoir des répercussions sur les 180.000 individus employés par cette industrie, les 250 équipementiers automobiles opérant au Maroc autour de 9 écosystèmes [NDLR : câblage, intérieur véhicules & sièges, métal emboutissage, batterie, PSA, moteurs, Renault, Delphi et Valeo]. En ce qui concerne le secteur du textile, employant plus de 160.000 individus au sein de 1.200 entreprises, il rencontre un problème au niveau de son approvisionnement et de sa demande étrangère. En effet, les approvisionnements au niveau du secteur sont fortement perturbés, comme une bonne partie de la matière première utilisée qui vient d'Asie, particulièrement de Chine. De même, les opérateurs n'ont pas de visibilité au niveau de la demande, notamment au vu de la baisse de la demande européenne sur le textile et habillement. Les petits agriculteurs et les coopératives sont également menacés par cette crise épidémique. En effet, l'annulation du SIAM devrait coûter au segment des coopératives et des groupes économiques plus de 12 MMAD de biens avec un risque de perte de chiffre d'affaires compris entre 60% et 80%. En ce qui concerne les fruits et légumes, l'association des producteurs et exportateurs de fruits et légumes (APEFEL) indique que les exportations de fruits et légumes vers l'UE sont actuellement en augmentation en raison du ralentissement de la production espagnole, portugaise et italienne. De même, les prix sont également en hausse comparativement aux conditions normales de marché. Par ailleurs, la Fédération des industries de la pêche (FENIP) indique que certains opérateurs relèvent une perturbation des chaînes logistiques et d'approvisionnement de matières premières, notamment les boîtes métalliques pour la conserve alimentaire. Pour la pêche, l'impact est à ce stade minime en raison de la période de repos biologique pour la pêche artisanale et la situation pourrait être, néanmoins, plus délicate à partir du premier avril. A noter que la délégation européenne note que l'industrie agroalimentaire, particulièrement la transformation de produits alimentaires, risque de subir un problème d'approvisionnement en intrants et en produits semi-finis. Elle souligne également que les 2.000 unités agro-industrielles présentes au Maroc pourraient être amenées à rencontrer un problème d'approvisionnement en ingrédients et additifs utilisés par la quasi-totalité des filières dans leur processus de fabrication.