Fouad et Zakaria sont tous deux nés au quartier Sidi Moumen Laqdim. Le premier est devenu délinquant et le second a constitué le groupe «Asserate Al Moustakime» (le droit chemin). Le groupe rencontre, le jour de l'Aîd Al Adha, Fouad dans un état d'ébriété avancé et il décide de le sacrifier par lapidation" au nom d'Allah“. Sidi Moumen Laqdim, un quartier de la grande périphérie de Casablanca, préfecture de Hay Mohammadi-Aïn Sebaâ. Tous les ingrédients de la criminalité et des fléaux nuisibles à la société sont là ; bidonvilles, terrains vagues abandonnés, haschisch, psychotropes, alcool, chômage, le pullulement des petites mosquées "non officielles", l'absence d'infrastructure. Un état qui justifie l'absence totale des autorités locaux et des représentants des habitants. La sécurité est assurée par trois arrondissements de police, trois brigades mobiles de la sûreté publique et par la police judiciaire. Répond-t-elle aux besoins d'une agglomération de 16 milles foyers renfermant 200 milles habitants? Sûrement pas avec un tel manque d'effectif et de moyens. Fouad Al Kardoudi et Miloudi Zakaria ont vu le jour dans ce quartier dans les années 70. Aucun d'entre eux n'a fait d'études poussées, ayant quitté l'école dans la phase collégienne. Et c'est là que leur parcours a pris un tournant décisif. Fouad s'est jeté dans le monde de la délinquance, du trafic et de la consommation de drogue, l'ivresse, les bagarres. En octobre dernier, alors qu'il est à son vingt-neuvième printemps, il a déjà à son actif six antécédents judiciaires, tous pour trafic de drogue et coups et blessures. Il est connu de la police de la région pour sa cruauté. La dernière fois, il a résisté violemment avant d'être arrêté. Miloudi Zakaria, orphelin de père, commence à se débrouiller pour gagner sa vie et aider sa mère. Il est devenu pieux, prie, jeûne, apprend l'Islam dans les livres. Il est allé plus loin, lorsqu'il a commencé à regrouper des personnes autour de lui. Ils commencent à faire des audiences de Dikr et de Hadith. Il les influence par ses idées, il leur parle des musulmans en Tchétchénie et en Afghanistan, en Europe, les exhorte à les soutenir un jour ou l'autre. Il a donné à son groupe un nom : «le Droit Chemin» et il leur explique que son idéologie est le «Salafisme du Jihad». Il est devenu leur idéologue, inspirateur et leur référence surtout lorsqu'il a écrit un livre en arabe intitulé «La dualité du discours dans la méthode des mouvements islamistes marocains» et un autre intitulé «Réplique sur le discours du docteur Azzedine Tawfik». Les éléments de ce groupe n'ont jamais eu maille à partir avec qui que ce soit jusqu'à ce jour d'Aïd Al Adha. Samedi 23 février. Il est seize heures. Fouad Al Kardoudi a déjà avalé une bouteille de mahia (eau de vie) et quelques comprimés psychotropes. Peu avant dix-huit heures trente, au moment de la prière d'Al maghrib, Fouad qui titubait, rencontre Mohamed O, membre du groupe «Le Droit chemin». «Allahouma Inna Hada Mounkar», s'écrie Mohamed s'adressant à Fouad. Ce dernier réagit, sort son couteau, lui assène un coup à la joue gauche. Mohamed court aux urgences de l'hôpital Mohammed V, où on lui fait trois points de suture. Au seuil des urgences, il rencontre ses «frères» Ali F, 23 ans, marchand de sandwiches, Khalid A, 24 ans, aide-commerçant, Mohamed L, 33ans, électricien, Abderrazak F, 28ans, marchand de légumes, Abdelhakim O, 26ans, journalier, Brahim F, Abderrahim O, marchand de soupe et trois autres «frères ». «On ne doit pas garder le mutisme devant ce qu'il a fait Fouad à notre frère, on doit réagir… On doit le maltraiter pour en faire un exemple pour les autres...» dit Brahim F avec violence, il n'a pu supporter être passif et il n'a pas pensé déposer plainte comme si on est dans une jungle. «On va le lapider…D'accord?» -«D'accord !». 19h 55mn. La prière d'Al Icha. Ils se sont rencontrés dans une petite mosquée. Après avoir effectué leur prière, ils sortent, se dirigent vers la place de la Poste. Chacun d'eux s'est posté dans un coin, guettant l'arrivée de Fouad. Abderrazak F s'est muni d'une pierre et d'un bâton, Mohamed O d'un couteau et les autres avaient fait un «chargement» de pierres. Fouad arrive en compagnie de son ami Saïd F. Mohamed O demande à leur frère de le laisser se venger tout seul. Ils refusent. Ils décident de réagir ensemble en lapidant le soûlard. L'un d'eux se présente devant Fouad, face à face. Fouad se saisit de pierres, ôte son tricot, hurle, crie ; insulte leur religion et Dieu. Son ami prend la poudre d'escampette. «Allahou Akbar !» crie l'un des «frères». Et c'est le début de la lapidation. Fouad tombe par terre. L'un des «frères» s'approche de lui, et, d'un dernier coup de pierre, lui assène le coup de grâce. Fouad rend l'âme en pleine rue. L'autopsie a conclu que le défunt est mort suite à un traumatisme et fracture crânienne causant une hémorragie cérébrale. Le lendemain, la police judiciaire de Hay Mohammadi-Aïn Sebaâ arrive à mettre la main sur cinq d'entre eux, à savoir Ali F, Khalid A, Mohamed L, Abderrazak F et Abdelhakim T et les ont remis au juge d'instruction, l'après-midi du mercredi 27 février. Les cinq autres «frères», qui ont pris la poudre d'escampette sont activement recherchés par la police.