Les intoxications par les produits industriels à usage domestique (PID) sont loin d'être rares au Maroc. Selon les statistiques du Centre antipoison et de pharmacovigilance du Maroc (CAPM) publiées dans la revue de «Toxicologie Maroc» du 3ème trimestre 2012, 4.155 cas d'intoxication et 47 décès ont été déclarés de 1980 à 2009. Des statistiques qui selon le CAPM restent très en dessous des chiffres de plusieurs pays qui recueillent plus de 200.000 appels par an, dont 11,4% des cas de PID. Une situation qui s'explique, en partie, par la sous-notification des cas d'intoxication au Maroc mais aussi par une population mal informée qui ignore les risques potentiels de ces produits. Parmi les produits incriminés, le matériel de peinture (diluant) arrive en tête avec 28,4% des cas, suivi des combustibles (14,46% des cas), les décapants (11,26%), pile (acide sulfurique) avec 2,48% des cas. Toutefois le CAPM tient à préciser que les produits d'entretien automobile sont les plus utilisés dans un but suicidaire. Dans les cas de toxicomanie, on retrouve parmi les produits incriminés : les décapants (solvants), colle et produits d'entretien des véhicules. Quant aux circonstances, l'intoxication accidentelle est le mode le plus fréquent (73,7% des cas). Les intoxications dans un but suicidaire arrivent en seconde place avec 27,16% des cas. A noter que ces intoxications touchent davantage le sexe féminin avec plus de 54%. Les cas déclarés étaient symptomatiques dans 65,44% des cas. La majorité des intoxiqués ont présenté des signes digestifs évoluant vers la guérison sans séquelles. Parmi les troubles, les affections du système gastro-intestinal sont les plus fréquentes (54,4%), suivies des troubles du système nerveux (18%) et les affections de l'appareil respiratoire (11,6%). Pour leur part, les intoxications aiguës mortelles concernent, le plus souvent, de jeunes adultes. La circonstance suicidaire en est la principale cause où les doses ingérées sont relativement plus fortes que lors de circonstances involontaires. S'agissant des régions les plus touchées par ce type d'intoxication, Rabat-Salé-Zemmour-Zaër et le Grand Casablanca ont enregistré le plus grand nombre avec respectivement 339 et 321 cas. D'après le CAPM, l'incidence cumulée élevée des cas d'intoxication au niveau de ces deux régions pourrait être expliquée par l'accessibilité aux services sanitaires et le transfert des malades ayant une intoxication domestique sévère vers les CHU. Pour le CAPM, il est possible de réduire ces intoxications grâce à une meilleure information du public et une collaboration des professionnels de santé, qui devraient avoir recours au CAPM pour connaître la gravité des cas exposés. Les industriels doivent également être impliqués dans la prévention en se conformant à plusieurs mesures : obligation d'étiquetage et d'emballage, introduction des bouchons de sécurité, interdiction de certaines substances dangereuses, surveillance des produits de contrebande et mise à la disposition du CAPM des fiches de sécurité. Des mesures préventives qui pourraient limiter la gravité des cas et les dépenses engendrées par la prise en charge des intoxiqués.