Hammadi Hamidouch fait partie des piliers du football national. Ex-joueur et ex-entraîneur des Lions de l'Atlas, il évalue la belle prestation du Maroc lors de cette CAN 2004 et parle de la demi-finale contre le Mali. Entretien. ALM : Comment voyiez-vous la sélection marocaine à la veille de son engagement dans la CAN 2004 ? Hammadi Hamidouch : Sincèrement, je voyais une jeune équipe qui partait en aventure. Elle me rappelle surtout la sélection du Maroc de 1980 lorsque j'étais à la tête de la direction technique avec un autre entraîneur marocain (Jebrane). C'était une équipe jeune dont l'entraîneur actuel du Maroc était le jeune gardien de but. Cette formation avait terminé troisième au classement à la CAN qui a eu lieu au Nigeria en 1980, alors que l'équipe était composée de jeunes joueurs et en pleine restructuration. Le Maroc avait battu l'Egypte en match de classementy par 2 buts à zéro. Aujourd'hui les Lions dirigés par Zaki sont allés bien loin pour la simple raison qu'ils n'étaient pas partis favoris. Pour moi, l'essentiel est d'avoir fait un bon parcours jusqu'à maintenant. Si nous passons en finale, tant mieux, si ce n'est pas le cas, cette jeune équipe aura quand même réalisé un grand exploit. Il ne faut pas leur en demander trop. Ce qui est certain en tout cas, c'est que nous aurons avec ces mêmes éléments une équipe parmi les plus fortes du continent en 2006 et jusqu'à 2010. Ce soir les Lions affrontent les Aigles du Mali, dernier obstacle avant de disputer le trophée. Pouvez-vous pronostiquer l'issue de cette rencontre ? Les pronostics en général ne sont jamais vérifiés. La célèbre formule que tout peut arriver dans un match de football est toujours de mise. Cependant je peux dire que c'est un match à double enjeu. Il y a d'abord la revanche des Marocains pour les matchs amicaux qu'ils avaient perdus devant le Mali, ensuite c'est la qualification qui va être chèrement disputée. Malgré la présence d'un joueur de la trempe de Kanouté, le Mali reste tout de même une équipe moyenne. Il y a quelques mois nous étions du même niveau à peu près. Actuellement je peux dire que cette équipe est à la portée des poulains de Zaki. De toute façon de l'avis des spécialistes, le Maroc est favori sur le papier. D'ailleurs après le départ du Cameroun, de l'Afrique du sud et de l'Egypte, je peux dire que le Maroc est l'une des meilleurs équipes de cette CAN. Comparé aux demi-finalistes je crois que nous n'avons rien à envier au Nigeria. En ce qui concerne le Mali comme je l'ai dit c'est une équipe montante. Quant à la Tunisie, je vois que depuis le début de cette édition, les Aigles de Carthage jouent beaucoup plus avec le public et l'enthousiasme qu'avec une stratégie footballistique définie. Conclusion, le Maroc a beaucoup de chance de forcer le destin après 28 ans de rêves non exhaussés. Que dire de Zaki en tant que sélectionneur national qu'on était sur le point de remplacer par un étranger ? Je tiens surtout à le féliciter pour le travail accompli. Baddou Zaki est mieux placé que qui que ce soit pour mieux comprendre la mentalité du joueur marocain. Un acquis qu'aucun entraîneur étranger si professionnel qu'il soit ne peut avoir. Ensuite il y a ce côté sympathique qui marque les relations entre Zaki et ses poulains qu'il est allé chercher partout. Les joueurs jouent certes pour défendre les couleurs nationales, mais parfois on a l'impression qu'ils tiennent à ne pas décevoir leur « père» qui se trouve sur le banc de touche. C'est cette image que je déduis des liens solides qui lient Baddou aux Lions de l'Atlas. Pour ce qui est des critiques à l'égard de Zaki, il faut savoir qu'ils ont toujours existé que l'entraîneur soit national ou d'une autre nationalité. Mais Zaki reste le mieux placé pour prendre n'importe quelle décision. Devons-nous tirer des leçons de cette image bien façonnée de notre équipe nationale ? Absolument. C'est une occasion en or pour le football marocain d'effectuer la grande réorganisation tant attendue. Nous avons pu voir comment des jeunes Marocains formés dans des centres professionnels peuvent être très compétitifs. C'est le moment de profiter de cet envol de notre sélection pour penser à mettre sur place une politique footbalistique à la hauteur des aspirations du large public marocain. D'autant plus que par la même occasion nous venons de marquer des points en vue de notre candidature pour le Mondial 2010. Le Maroc a retrouvé sa réputation d'antan au niveau continental. Nous avons prouvé nos capacités en matière de sécurité lors de la visite de la commission, d'inspection de la FIFA qui a assisté au derby casablancais entre le WAC et le Raja devant plus de 60 000 spectateurs sans qu'aucun incident ne soit enregistré. Alors que les services de sécurité tunisiens ont peiné pour rétablir l'ordre dans le stade face à seulement quelques milliers de supporters algériens. Quant à la ferveur du public Marocain pour le football, elle n'est plus à démontrer. Je souhaite de tout mon cœur que le Maroc renoue avec l'exploit de 1976.