Créé «au forceps» en 2003 sur l'insistance des Pouvoirs Publics français ( tout particulièrement grâce aux efforts du ministre de l'Intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy ), les Conseils régionaux du culte musulman ( CRCM ) en France faisaient l'objet, ce dimanche 5 juin, de nouvelles élections. Un scrutin marqué par le refus de participer d'une grande partie des acteurs de l'Islam militant de France, en particulier la Fédération de la Grande Mosquée de Paris (FGMP) et l'Union des Organisations Islamiques de France (U.O.I.F.). Pour ces deux dernières organisations, la première liée au pouvoir algérien, la seconde appartenant à la mouvance des Frères musulmans, le mode de scrutin serait inique car reposant sur une représentation calculée uniquement sur la base du nombre de mètres carrés des lieux de prière. Aux précédentes élections, organisées sur les mêmes critères, l'U.O.I.F. avait pourtant largement participé et, d'ailleurs, remporté un grand nombre de sièges et plusieurs présidences régionales. En fait, l'U.O.I.F. et la F.G.M.P. n'étaient pas en position de remporter les élections, dans la plupart des régions comme au plan national (ce sont les Conseils régionaux qui élisent le bureau national du Conseil français du culte musulman (C.F.C.M.). Comme on pouvait s'y attendre, le Rassemblement des Musulmans de France ( R.C.M. ), très lié au Maroc officiel, a, ainsi, gagné haut la main les élections. Déjà le président sortant du C.F.C.M., Mohammed Moussaoui, était un Marocain du R.C.M. . Plus que jamais «l'Islam de France» prend un visage très marocain. Pour beaucoup d'observateurs, ces élections auront été marquées par la prétention des pouvoirs algérien et marocain à contrôler l'organisation de l'Islam en France, et par la rivalité entre les deux pays. En fait, Algérie et le Maroc se sont mobilisés d'une manière très inégale. Le pouvoir algérien, certes, aurait souhaité que les C.R.C.M. comptent une majorité d'élus d'origine algérienne. Mais il a manifestement engagé très peu d'argent dans cette «bagarre», comme s'il savait la partie perdue d'avance, ou comme s'il ne faisait pas vraiment confiance dans les candidats ayant un lien avec l'Algérie. Le Maroc, lui, au contraire, a déployé de gros efforts, humains et financiers, pour soutenir les candidats du R.M.F., cette dernière organisation parvenant même à «siphonner» des proches (d'origine marocaine) de l'U.O.I.F.. Mais cela moins pour «damer le pion» aux Algériens, que pour couper l'herbe sous le pied aux deux formations islamiques marocaines, le P.J.D. et Justice et Bienfaisance qui, depuis quelques années, tentent de prendre le contrôle des mosquées d'Europe fréquentées en majorité par des originaires du Maroc. Une course de vitesse «entre Marocains» (ou Franco-marocains) d'une importance essentielle pour le Trône, mais aussi pour les autorités françaises très soucieuses d'empêcher la radicalisation des musulmans pratiquants. Il n'est certainement pas heureux que les musulmans d'origine algérienne ne puissent pas être représentés au C.F.C.M.. Mais c'est un fait que les musulmans qui fréquentent les mosquées de France sont majoritairement d'origine marocaine ou turque.