L'invitation de la CCRC a divisé les jeunes du 20 février. Certains iront rencontrer la Commission Mennouni, d'autres refusent, ce qui pose le problème de la structuration du Mouvement. Aller ou ne pas aller voir la Commission Mennouni ? Les jeunes du 20 février ne se sont pas mis d'accord sur le fait d'accepter ou de refuser l'invitation faite par la Commission consultative de révision de la Constitution (CCRC) de les rencontrer samedi 16 avril. Certaines sections régionales de ce Mouvement des jeunes ont décidé de ne pas présenter leurs propositions pour la réforme constitutionnelle devant la CCRC. La section de Rabat-Salé du Mouvement du 20 février a indiqué, dans un communiqué, rendu public mercredi 6 avril, que cette décision de boycott s'explique par le fait que «la CCRC a été nommée d'une manière non-démocratique», et de ce fait «elle n'est pas légale et ne représente pas la volonté populaire». La section de Casablanca de ce Mouvement a adopté, mercredi 6 avril, la même position, lors de la tenue de son assemblée générale. Selon Najib Chaouki, leader du Mouvement du 20 février à Rabat, outre l'argument évoqué dans le communiqué, trois autres éléments justifient le boycott par les jeunes des travaux de la Commission Mennouni. Il s'agit de la présence parmi la CCRC de membres «qui ne croient pas à la démocratie», «l'absence de confiance» entre l'Etat et le Mouvement de protestation et «l'exclusion» des jeunes du Mouvement des médias publics (voir entretien page 6). Cette position prise par les sections de Casablanca et de Rabat du Mouvement du 20 février ne fait pas du tout l'unanimité auprès des jeunes. «Il faut participer à la révision de la Constitution. Le mouvement ne doit pas rester à l'écart et s'exclure de ce processus. Parce que sa jeunesse représente la masse du peuple marocain et doit être en phase avec ses attentes et sa volonté», précise Houcine Abenkcer, membre du Mouvement du 20 février, section de Casablanca (voir entretien page 5). «Il faut que le Mouvement du 20 février sorte du monde virtuel pour s'impliquer dans la réalité et s'engager dans tous ses fronts. Aujourd'hui, deux mois après la création du Mouvement, la structuration de ce dernier s'impose pour que ses tenants et ses aboutissants sortent de la confusion», ajoute-t-il. Par ailleurs, un autre élément du communiqué du 20 février de Rabat-Salé a «choqué» les jeunes qui tiennent à aller rencontrer la CCRC. Il s'agit de l'interdiction faite aux membres du 20 février de se présenter devant la Commission Mennouni sous la menace d'exclusion du Mouvement. «Une attitude non-démocratique qui rappelle des pratiques malsaines d'une ère révolue. On appelle à la démocratie et l'on continue à travailler avec des méthodes exclusitionnistes», explique un jeune du 20 février. «Le Mouvement des jeunes de facebook ne doit-il pas s'inscrire dans le processus de la refondation constitutionnelle au lieu de continuer de hausser la barre des revendications pour fuir en avant face aux épreuves?», s'interroge un observateur. Cette question est d'autant plus importante que l'opinion publique nationale souhaiterait bien aussi connaître en détails les propositions des jeunes pour la réforme de la Constitution à l'image de ce que les partis politiques et les Centrales syndicales ont fait. A cela s'ajoute le fait que la contribution active des jeunes du 20 février au processus de la réforme constitutionnelle pilotée par la Commission Mennouni permettrait d'enrichir le débat à propos du chantier fondateur initié par SM le Roi. D'ailleurs, certains membres du 20 février partagent cet avis et s'opposent fermement à la demande de boycott de la CCRC. «Les jeunes du 20 février plaident, en réalité, pour une démocratie idéale qu'on a toujours enseignée aux jeunes dans les facultés. On ne peut passer d'une monarchie exécutive à une monarchie parlementaire du jour au lendemain. Or, on ne cherche actuellement qu'à instaurer une démocratie équilibrée», précise le politologue Mohamed Darif (voir entretien ci-dessous). «El Youssoufi parlait en 1998 de la transition démocratique. Or, cette transition n'a fait que commencer après le 9 mars. Le problème au Maroc c'est que certaines parties cherchent à épouser des mécanismes révolutionnaires dans une situation qui n'est pas révolutionnaire», indique-t-il. Les propos de M. Darif sont clairs. Au Maroc, ce ne sont pas les expériences tunisienne et égyptienne qui se reproduisent. Le Royaume fait l'exception dans une région secouée par la vague des contestations sociales car le déclenchement du processus des réformes, de démocratisation de l'Etat de droit ne date pas d'hier.