Elle venait de descendre d'un grand taxi quand elle a été conduite par un repris de justice vers un terrain vague. Là, elle a supporté ce qu'elle n'avait jamais imaginé subir : elle a été violée. Comme toutes les jeunes filles violées, elle n'arrivait pas à fixer son agresseur. Angoissée, elle baissait la tête comme si elle était la coupable et non la victime. Quant à lui, il n'hésitait pas de temps en temps à la dévisager. Nous sommes à la chambre criminelle près la Cour d'appel à El Jadida. Samir était au box des accusés. Il est à son trente-deuxième printemps. Son casier judiciaire n'est pas vierge. Quatre antécédents judiciaires souillent son parcours. Le premier avait eu lieu quand il venait d'avoir ses dix-huit ans. Il a été interpellé pour vol simple et a été condamné à six mois de prison ferme. Deux mois après sa sortie de prison, il a été arrêté une deuxième fois pour vol avec récidive. Une arrestation qui lui a coûté une peine d'emprisonnement de huit mois de prison ferme. Quand il avait vingt-quatre ans, il a été mis hors d'état de nuire pour la troisième fois. Seulement, cette fois-ci, il n'a pas été arrêté pour vol, mais pour viol et coups et blessures. Son châtiment était de trois ans de prison ferme. À son vingt-neuvième printemps, il a été incarcéré pour la quatrième fois, et ce pour constitution d'une bande de malfaiteurs, coups et blessures et complicité de vol qualifié. Un tas de crimes qui lui ont valu uniquement dix-huit mois de prison ferme assortie d'une amende de mille dirhams. Mais il semble qu'il n'avait pas l'intention de s'arrêter et de ne sortir de prison que pour y retourner. Enfin, Samir était à sa cinquième arrestation. Pour quel motif ? « Tu es accusé de viol doublé de coups et blessures, menaces à l'arme blanche et consommation de drogue », lui a rappelé le président de la Cour qui avait demandé à la victime de sortir de la salle d'audience en attendant qu'il l'appelle pour présenter son témoignage. Samir se disculpait, clamait son innocence, disait qu'il n'a jamais violé la jeune fille et expliquait à la Cour qu'elle était sa maîtresse. «Menteur», a répliqué la jeune fille quand elle a été interrogée par le président sur les déclarations de son agresseur. En fait, devant la Cour, elle a raconté l'histoire comme si elle vient de se dérouler. Elle l'a relatée avec ses petits détails. « Je venais de descendre d'un grand taxi… Je travaille dans une société située au quartier industriel», a-t-elle affirmé les larmes aux yeux. Rares sont les victimes qui ne fondent pas en larmes quand elles racontent leurs mésaventures devant la Cour. Samir gardait le silence quand elle l'a traité de menteur. Il n'a pas réagi. Il a gardé son calme. La jeune fille a affirmé à la Cour qu'elle devait parcourir une distance de plus de cinq cents mètres pour arriver chez elle. À mi-chemin, Samir s'est tenu devant elle. Elle n'a pas remarqué où il était caché. Sous la menace d'un couteau, il l'a obligée à l'accompagner. Où ? À un terrain vague. Elle l'a suppliée. Mais en vain. Peu importe ses supplications. Il l'a menacée de meurtre si elle ne gardait pas le silence. Elle n'avait pas le choix. D'abord, il semble qu'il était sous l'effet de la drogue. Haschich ou comprimés psychotropes ? «Je n'étais pas drogué, M. le président», a-t-il répondu à cette question. Il l'a conduite jusqu'au terrain vague et l'a obligée à lui céder. Il l'a violée sans pitié. Quand il a assouvi son désir bestial, il l'a raccompagnée jusqu'à chez elle avant de prendre la fuite. «Non, M. le président, elle était ma maîtresse. Quand j'ai décidé de rompre ma relation avec elle, elle a voulu me jeter en prison», a-t-il répondu à la Cour. Une réponse qui n'a pas convaincu la Cour. Celle-ci l'a jugé coupable et l'a condamné à six ans de réclusion criminelle.