Elle venait de descendre du bus à son retour de l'université quand elle a été croisée par un voyou. Celui-ci n'a pas hésité à la menacer avec un couteau et la conduire là où il l'a violée atrocement. Comme toutes les victimes de viol, elle semble être déprimée, incrédule et submergée par la peur et la culpabilité. Sur un siège, dans la salle d'audience à la chambre criminelle près la Cour d'appel de Casablanca, elle se tenait à côté de sa mère sans qu'elle parvînt à fixer l'assistance. Sur sa tête, elle mettait un foulard qui cachait même une partie de son visage. Difficile de la dévisager et de décortiquer ses traits. Sa mère lui chuchotait de temps en temps à l'oreille. Elle se contentait de hocher sa tête sans lui dire le moindre mot. Quand le président de la Cour a appelé son violeur pour passer à la barre, les larmes ont coulé de ses yeux. Se Souvenait-elle du calvaire qu'elle avait enduré ? Sûrement. Et quand elle a entendu son nom et prénom prononcés par le président de la Cour, elle a gardé le silence sans bouger de son siège. Le magistrat l'a appelée une fois encore. Et elle s'est tenue debout sans oser regarder personne. À pas lents, elle a avancé vers le perchoir. «Regarde-moi ma fille, tu n'es qu'une victime. C'est lui qui doit avoir honte et non pas toi», lui a dit le président de la Cour comme s'il avait l'intention de l'aider à ne pas se sentir coupable. En écoutant ces mots, elle a fondu en larmes. Rapidement, le juge l'a sollicitée de sortir en dehors de la salle d'audience et attendre qu'elle soit appelée. Nonchalamment, elle est parvenue à sortir de la salle d'audience. Sa mère l'a suivie. Toutes les deux sont restées dehors. Le président de la Cour a entamé l'interrogatoire du mis en cause. La victime n'écoutait rien en dehors de la salle d'audience. Elle ignorait s'il allait avouer son crime ou le nier. «M. le président, je ne la connais pas… Elle m'a indûment accusé. Je ne sais pas pourquoi», s'est-il disculpé devant la Cour. Le président de la Cour lui a rappelé qu'il avait signé son PV d'audition quand il était interrogé par les enquêteurs de la police judiciaire. «Je ne savais pas ce que la police avait écrit, M. le président. La police m'a demandé de signer et j'ai signé sans lire le procès-verbal. Je n'ai rien déclaré lors de mon interrogatoire sauf que je suis innocent », a-t-il affirmé. Repris de justice, ce jeune mis en cause de vingt-six ans, célibataire et sans profession, avait purgé une peine d'emprisonnement de trois ans ferme pour le même motif, à savoir le viol. Le président de la Cour a appelé ensuite la jeune victime. Âgée de vingt ans, cette étudiante a raconté qu'elle venait de descendre du bus quand ce jeune l'a suivie comme son ombre. «Il était 19 h passées, M. le président. Je lui ai dit que je n'ai rien à lui donner. Parce que je croyais qu'il est uniquement un voleur. Seulement, il a brandi un couteau et m'a menacée de meurtre si je demandais secours. J'ai gardé le silence», a-t-elle déclaré avec les larmes aux yeux. Il l'a conduite jusqu'à un terrain vague. Il l'a obligée à se dévêtir et lui céder. Il l'a violée. Il l'a même sodomisée. «Il m'a détruit M. le président», a-t-elle dit sans arriver à tenir ses larmes. Le mis en cause se contentait de la regarder sans manifester le moindre sentiment de regret. Quand elle a terminé son récit, elle est retournée à sa place juste à côté de sa mère qui a commencé à la consoler . Elle n'a pas pu retenir ses larmes même quand elle a entendu le jugement rendu contre son violeur, à savoir six ans de réclusion criminelle. Parce qu'elle n'arrive pas encore à reprendre sa vie normale.