Bernard Kouchner et Fadela Amara ont réussi à coaguler un tel sentiment de rejet et sont parvenus à provoquer chez le président un ressentiment difficile à cacher. La rumeur, folle comme d'habitude, mystérieuse comme toujours, étincelante comme jamais, donnait deux vastes scénarios à l'issue de ce second tour des régionales que Nicolas Sarkozy pourrait envisager. Le premier est un grand chambardement qui pourrait engloutir même le Premier ministre François Fillon dans une tentative de redessiner l'ensemble de l'exécutif. Le second est celui d'un ajustement technique mineur mais qui pourrait ne pas manquer d'un sens politique, comme a tenu à le préciser le secrétaire général de l'Elysée Claude Guéant. Entre ces deux scénarios qui oscillent entre le changement radical et celui a minima, se trouvent les nombreuses opérations cosmétiques qui consistent à troquer les maroquins entres les ministres eux-mêmes, histoire de redonner un nouveau souffle sans être obligé de sévir et de sanctionner. Mais ce qui était commun à tous les scénarios, évoqués aussi bien par la grande presse que par les sites confidentiels, c'est la sortie presque assurée de deux emblèmes du gouvernement Sarkozy que sont le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner et la secrétaire d'Etat à la Ville Fadela Amara. Ces deux personnalités ont réussi à coaguler contre elle un tel sentiment de rejet et sont parvenus à provoquer chez le président un ressentiment difficile à cacher. Le premier est Bernard Kouchner. Sa relation avec Nicolas Sarkozy est décrite comme «pénible» pour reprendre l'expression utilisée par l'entourage de l'Elysée. La sanction paraît d'autant plus injuste que Bernard Kouchner ne s'est jamais réellement opposé aux choix du président de la République sur les questions internationales. Il a même accepté le fait que le cœur de la politique étrangère de la France soit piloté par le duo Claude Guéant, Jean-David Levitte au risque de faire du Quai d'Orsay, siège historique du ministère des Affaires étrangères, un musée pour les nostalgiques. Et même quand il lui arrivait de marquer sa différence, notamment sur l'Iran ou sur l'Etat palestinien ou sur l'Algérie comme il vient de la faire récemment, c'est davantage attiré par un exercice d'autopromotion que par une réelle tentation de se démarquer. La seconde personnalité dont le départ semblait acquis, en tous cas dans les bourses des pronostics, est celui de Fadela Amara, secrétaire d'Etat à la Ville. Son maintien à ce poste devenait intenable. Elle incarne le grand échec de l'ambitieux plan pour sauver la Banlieue promis en grande pompe par Nicolas Sarkozy mais qui avait accouché de minuscules mesures comparables à celles qui, en d'autres temps, étaient destinées à peindre les cages d'escaliers. Malgré un effort surhumain de vendre ces réalisations, Fadela Amara ne pouvait cacher indéfiniment sa déception. Des effluves d'amertume montaient régulièrement de son cabinet au point d'agacer plus d'un ministre. Pour Nicolas Sarkozy, Bernard Kouchner et Fadela Amara ont un point commun qui justifie à ses yeux leurs disgrâces, C'est qu'ils n'ont pas montré une implication dans la campagne des régionales et ont pratiqué la politique de la chaise vide. Surtout à un moment où la majorité présidentielle avait besoin de mobiliser toutes ses forces pour convaincre les Français de pas voter Rose/Vert ou de ne pas s'abstenir.