Dominique Strauss-Kahn a un père alsacien, une mère juive de Tunisie et a passé une partie de son enfance à Agadir au Maroc. On a tradition de dire que lorsqu'on est «loin des yeux», on prend le risque d'être «loin du cœur». C'est une évidence qui devient encore plus vraie en politique. Or Dominique Strauss-Kahn vient de démentir cet adage. Sa dernière et fulgurante ascension dans les sondages, avec l'hypothèse luxueuse de battre Sarkozy dans un second tour, est la preuve qui contrarie l'adage. Sur le plateau télé qui l'a reçu lors de son passage avant-hier à Paris, le directeur général du Fond, monétaire international s'en est allé jusqu'à affirmer, un peu taquin certes, que «c'est peut-être parce que je suis loin que les Français m'aiment bien». Certes, la météorologie sondagière est capricieuse, versatile. Une hirondelle sondagière ne fait nécessairement un printemps électoral. Il reste que cette manifestation momentanée de l'opinion a de quoi effaroucher sous les lambris de la République mais aussi dans les chaumières endommagées du Parti socialiste. Dominique Strauss-Kahn a un père alsacien, une mère juive de Tunisie et a passé une partie de son enfance à Agadir au Maroc. Il compte parmi les amis du Maroc. Brillant logiciel, il n'est pas du genre à s'épuiser dans des débats fumeux sur l'identité. Il a eu la chance, lui le socialiste, de prendre le FMI, avec l'aide, il faut le noter, de Nicolas Sarkozy, et ce juste à la vieille de la crise financière mondiale qui lui est devenue une aubaine. Cette institution autrefois honnie pour son rôle de «gendarme», va enfiler, sous sa houlette, le statut de «médecin» spécialisé dans l'endocrinologie. Pédagogue en diable, il résume simplement et à sa manière sa conception du FMI qui pour traiter «le cholestérol» d'un pays, son institution «apporte les moyens pour le remettre sur pied mais lui interdit la charcuterie». Ce sondage a un intérêt. Il indique un début comme un début de décrochage de Nicolas Sarkozy. Il s'explique par un agacement perceptible d'une partie, de plus en plus grande, de l'opinion française: c'est un peu la fin de la politique du mot incantatoire et des biceps verbaux. La réalité vécue par les Français use la puissance et l'incandescence du discours malgré les virtuosités exceptionnelles d'un prestidigitateur comme Sarko. Il y a par ailleurs comme une lassitude de l'arrogance du pouvoir dont l'affaire de Jean Sarkozy n'est qu'un des avatars. Enfin et au fil de l'eau, l'opinion sera de moins en moins dupe sur l'empressement à faire usage du bouquet électoral, bien que nauséabond, qui à la veille de chaque scrutin, sollicite adroitement (sic) sécurité, immigration et identité. Surtout quand les résultats sur ces questions ne sont pas au rendez-vous.