Khalid Naciri, ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, affirme que le paysage audiovisuel au Maroc est aujourd'hui normalisé à l'image des pays les plus développés. ALM: Quel bilan faites-vous des mesures prises dans le cadre de la libéralisation du secteur de l'audiovisuel au cours des dix dernières années? Khalid Naciri : Je dirai que le bilan ne peut être que positif. Ce n'est pas là un discours convenu, mais bien le constat d'une réalité quotidienne. En effet, la réforme a touché aussi bien le volet juridique que réglementaire, ce qui a permis la mise en place d'une instance de régulation, l'adoption des cahiers des charges comme outil de définition des obligations des opérateurs, une offre de programmes forte de dix chaînes de télévision et d'une trentaine de radios, une mise à niveau de la qualité des ressources humaines et la modernisation des standards technologiques par l'adoption de la TNT (télévision numérique terrestre). Ce sont là quelques aspects qui prouvent que le paysage audiovisuel national évolue en profondeur. Le pôle public, malgré toutes les critiques excessives, a connu une mutation et une mise à niveau profonde, ce qui lui a permis d'assumer pleinement sa mission de service public, et relever, avec succès, les défis de la concurrence, la qualité et la proximité. Pensez-vous que le Maroc est actuellement sur la bonne voie en ce qui concerne cette libéralisation? Mais justement, la réponse ne peut être que «oui». D'ailleurs les indicateurs sont là pour le prouver. Notre paysage audiovisuel est aujourd'hui normalisé à l'image des pays les plus développés. Notre réforme est considérée par plusieurs pays africains et arabes comme un modèle. L'écoute de la radio est devenue exclusivement marocaine et la télévision enregistre une audience de plus 50%. Maintenant, il faut reconnaître que la libéralisation a été plus rapide en matière de radio que de télévision, à cause d'un contexte que tout le monde connaît. Cela ne signifie pas toutefois que les pouvoirs publics aient changé d'approche. Quelle évaluation faites-vous du programme de mise à niveau du secteur de l'audiovisuel ? La mise à niveau du secteur de l'audiovisuel est en cours. Elle est échelonnée dans le temps, pour toucher l'ensemble des composantes. Les multiples actions menées à la date d'aujourd'hui ont visé notamment la modernisation de l'arsenal juridique des outils de gestion, des moyens de production et de diffusion. La généralisation de la couverture TNT, le développement aussi bien quantitatif que qualitatif de la production audiovisuelle nationale, l'accompagnement médiatique de la vie politique nationale dans le respect de son pluralisme, sont des chantiers en cours. Ils ne s'arrêteront pas. Les opérateurs publics, SNRT et 2M, sont non seulement conscients mais impliqués. Quels sont, à votre avis, les principaux défis qui se posent au secteur de l'audiovisuel au Maroc? Si je devais résumer en la matière, je dirai l'augmentation du volume et la qualité de la production audiovisuelle nationale, la qualité des ressources humaines, l'augmentation de l'assiette publicitaire, la diversification des sources de financement de l'audiovisuel public et enfin le défi de la concurrence déloyale des mastodontes de l'audiovisuel arabe, notamment dans le domaine du sport. Les professionnels du secteur de la presse mettent l'accent sur la nécessité de la réforme du Code de la presse. Qu'en pensez-vous? Si on se met d'accord sur le fait que la réforme du Code de la presse est un moyen et non pas une fin en soi, les termes du débat deviendront plus clairs. Il n'y a pas lieu de fétichiser le texte. Si j'ai des interlocuteurs positifs, c'est–à dire attachés non seulement à leurs intérêts corporatistes mais aussi à la mise en œuvre d'une culture médiatique démocratique mature et responsable, tout deviendra facile. Mais si on se lance dans des procès d'intention outranciers c'est l'échec annoncé. Il est grand temps de préciser que contrairement à une lecture superficielle, la démocratie n'est pas l'œuvre des seuls pouvoirs publics et ce n'est pas seulement une série de mécanismes. C'est d'abord une culture et une éthique et elle doit être pleinement assumée aussi par les professionnels. Le pays attend d'eux une implication courageusement assumée.