Suite à une demande formulée par les dirigeants du PJD, le MUR a interdit aux ouléma du mouvement de s'exprimer sur les questions d'actualité. Les dirigeants du Mouvement unicité et réforme (MUR) ont décidé de réduire la marge de manœuvre des ouléma affiliés à ce mouvement. Les restrictions vont de la participation aux manifestations publiques à la prise de parole. Cette décision a été notifiée aux intéressés, comme dans tout mouvement islamiste, à travers une note verbale que des émissaires ont été chargés de transmettre aux différentes sections régionales du MUR. «Seuls sont habilités à se prononcer sur les questions d'actualité, notamment le chiisme, l'évangélisme et l'homosexualité, trois personnes à savoir le président du mouvement, Mohamed Hamdaoui, l'ancien président, Ahmed Raïssouni, et le fqih Ezzeddine Taoufiq», indique, entre autres, le message de la direction centrale du mouvement. Trois personnes seulement ont donc le droit à la parole dans le mouvement. Une source informée indique que cette décision a été prise suite à une requête exprimée par les dirigeants du Parti de la justice et du développement (PJD). Ces derniers estiment que la conjoncture politique actuelle est assez tendue et qu'il vaut mieux éviter des fausses notes qui risquent de perturber davantage les relations entre le parti et les autorités. «Depuis l'arrivée de Abdelilah Benkirane à la tête du parti, l'équilibre entre le bras idéologique et le bras politique du mouvement a été déstabilisé et les repères ont été perdus», estime la même source avant d'ajouter que «ce déséquilibre a engendré un empiètement du mouvement sur les prérogatives politiques censées être réservées au parti et un dérapage du discours du PJD vers des thématiques ayant trait à la moralité publique et à la religion qui sont du ressort du MUR». Le PJD, qui est en train de payer cher la multiplication des bévues de ses dirigeants, ne veut donc pas courir le risque, en période préélectorale, de laisser les fqihs du mouvement prendre la parole à leur guise d'où la décision de limiter leur droit à prendre la parole sur des thématiques sensibles. Une décision politiquement judicieuse. Mais s'agit-il d'une démarche conforme à la Charia. Selon la littérature islamiste, la prise de parole par un alem doit être libre. Car, comment peut-il, alors, rappeler les gens à l'ordre conformément à la mission que lui confère le projet islamiste ? Ordonner à des fqihs de ne pas dire ce qu'ils pensent est une attitude qui est en contradiction flagrante avec le principe essentiel du discours islamiste, à savoir ne jamais réprimer le droit des ouléma à dire ce qu'ils pensent. En prenant cette décision, le MUR crée un antécédent qui peut servir, peut-être, de jurisprudence ou de fatwa pour d'autres mouvances islamistes ayant des ambitions politiques.