Suspendu de la fonction publique, Hassan, la cinquantaine, a pu ouvrir sa propre infirmerie au quartier Mimouna, à Settat. Et, jusqu'à son arrestation, il procèdait à l'avortement des filles célibataires. Combien de jeunes filles a-t-il fait avorter ? Combien de fœtus a-t-il jetés dans les canalisations des égouts ou dans la rue et qui deviennent un repas délicieux pour les chiens errants? Vingt? Plus. Cinquante ? Plus. Cent ? peut-être. Hassan F. ne se souvient pas tellement ses victimes sont très nombreuses. D'abord, peu importe, pour lui, leur nombre. Ce qui l'intéressait c'était les sommes d'argent qu'il amassait au point que sa qualité d'ange blanc s'est métamorphosée en Satan noir, sans pitié. Cet infirmer, quinquagénaire, époux d'une infirmière, exerçait à l'hôpital public avant sa suspension suite à des fautes professionnelles. Comment devait-il alors gagner sa vie? Il est arrivé à décrocher une autorisation auprès du ministère de la santé pour l'ouverture d'une infirmerie, juste pour changer les pansements et faire des injections aux patients. Effectivement, il a ouvert sa nouvelle infirmerie au quartier Mimouna, à Settat. Seulement, il semble que le changement des pansements et les injections ne lui rapportent pas trop. La solution ? Elle est très simple pour lui. Il a ouvert les portes de son infirmerie pour accueillir les jeunes filles qui tombent enceintes et qui désirent se faire avorter. Il a travaillé durant de longues années sans le moindre problème. Les jeunes filles rentrent à l'infirmerie avec une ventre gonflé et en sortent sans gonflement. Mais comment est-il arrivé qu'il a été annoncé dernièrement ? C'est une jeune fille qui l'a dénoncé devant les enquêteurs de la police. Cette dernière avait une relation amoureuse avec un jeune homme qui lui promettait le mariage. Elle partageait le même lit avec ce dernier au point qu'elle est tombée enceinte. Que doit-il faire pour ne pas être trahie devant sa famille? Son amant lui a proposé de sa faire avorter à l'infirmerie du quartier Mimouna, avant qu'il se présente devant sa famille pour la demander en mariage. Mais après l'opération, la jeune fille a été abandonnée par le jeune homme. Quand elle l'a croisée dans la rue, il lui a reproché sa trahison, un malentendu a éclaté entre eux au point que les policiers sont intervenus pour les conduire au commissariat. Soumis aux interrogatoires, les deux amants ont dévoilé le nom de l'infirmier qui a fait avorter la jeune fille. Alerté, le procureur du Roi près le tribunal de première instance de Settat a donné ses instructions pour lancer une enquête minutieuse sur l'activité de l'infirmier en question. Mardi 6 janvier. Le substitut du procureur du Roi, et les limiers de la police judiciaire ont effectué une descente brusque dans l'infirmerie du quartier Mimouna. Aussitôt, ils ont procédé à un constat d'usage, soldé par la saisie de plusieurs appareils nécessaires pour l'avortement, entre autres des ventouses nécessaires pour aspirer les fœtus et des chiffons maculés de sang. Et par hasard, au moment de la perquisition, une jeune fille vient se présenter devant le substitut du procureur du Roi qui se tient devant la porte de l'infirmerie et lui demande le coût d'une opération d'avortement. Elle pensait qu'il était l'infirmier en question. Elle lui a livré une somme de 2.500 dh. Arrêtée, la jeune fille a été conduite en compagnie de l'infirmier, Hassan, et son assistante vers le commissariat de police pour continuer les investigations et soumettre les mis en cause aux interrogatoires. Les enquêteurs ont appris que l'infirmier en cause procédait à des avortements contre des sommes allant de 1.500 à 6.000 dh et qu'il se débarrassait des fœtus en les jetant dans la canalisation des égouts ou en les larguant dans les rues une fois la nuit tombée pour qu'ils soient un bon repas pour les chiens errants. L'enquête policière est allée plus loin pour identifier les jeunes filles qui avaient passé par cette infirmerie en recourant au téléphone portable de l'infirmier en cause. Ainsi, ils ont identifié une dizaine de clientes qui lui ont téléphoné durant deux jours et qui ont été arrêtées. L'infirmier, son assistante et 16 jeunes filles ont été traduits devant le tribunal de première instance de Settat qui les a déféré devant le parquet général près la Cour d'appel de la même ville. Ce dernier a gardé l'infirmier et son assistante en détention préventive, alors que les jeunes filles et un pharmacien qui aidait le mis en cause à avoir des clientes sont poursuivis, en liberté provisoire.