L'industrie touristique marocaine continue d'afficher une forte croissance au premier semestre 2008. Pour réaliser ses objectifs ambitieux, le gouvernement s'est engagé à réaliser un ensemble de stations balnéaires haut de gamme et à développer le tourisme interne. D'après les dernières statistiques fournies par l'Observatoire national du tourisme, 2,5 millions de touristes ont visité le Maroc au cours des cinq premiers mois de l'année, soit une hausse de 11% par rapport à la période comparative de 2007. L'année dernière, 7,4 millions de touristes ont visité le Royaume, un résultat que le gouvernement espère porter à 10 millions de touristes à l'horizon 2010. Cet objectif, défini par la politique touristique «Vision 2010», paraît réalisable quand on voit la forte croissance du nombre de visiteurs à ce jour. Les vacanciers en provenance d'Europe et des pays méditerranéens voisins du Maroc représentent la majeure partie des touristes. Selon l'Observatoire national du tourisme, 927 000 ressortissants français ont visité le Royaume entre le mois de janvier et le mois de mai inclus. Derrière les Français, qui représentent le plus grand groupe de touristes étrangers, arrivent les Espagnols (587 000), les Britanniques (141 000), les Italiens (116 000), les belges (113 000), les Allemands (97 000) et les Néerlandais (75 000). Vision 2010 ambitionne de drainer 4,4 milliards de dollars d'investissements dans le secteur du tourisme. Actuellement, les projets à vocation touristique ambitionnent de porter la capacité d'accueil hôtelière à 250 000 lits (au lieu de 133 000 en 2006) et de réaliser six nouvelles stations balnéaires dans le cadre du «Plan Azur» pour un développement durable des espaces côtiers au Maroc. Les nouvelles stations seront localisées à Larache, El Jadida, Agadir, Essaouira, Guelmim sur la côte Atlantique et Saïdia sur la côte méditerranéenne. Parmi les autres programmes qui incarnent cette politique touristique marocaine, figure notamment le «Plan Biladi», qui entend promouvoir le tourisme à l'échelle nationale et encourager les Marocains à recourir au secteur formel (par opposition au marché noir) quand ils prennent leurs vacances dans le Royaume. En effet, les touristes étrangers bénéficient dans la plupart des cas de prix très intéressants, contrairement aux touristes nationaux, ce qui occasionne un motif de plainte et une entrave au développement du tourisme interne formel. Cette situation est principalement due au fait que de nombreux touristes étrangers voyagent par le biais de tour-opérateurs intégrés qui réservent des chambres en gros à prix bas. La plupart des hôtels sont trop cher pour la majorité des Marocains, d'où l'essor du marché noir au niveau du logement, dont le coût s'élève à peine à 100 dirhams (14 dollars) la nuit – le revenu annuel moyen étant de 2 000 dollars. «Il faut également prendre en ligne de compte que la contrainte majeure est relative à l'absence de la démocratisation du tourisme interne. Ce qui nous nécessite de prendre en considération le pouvoir d'achat de nos compatriotes. L'obstacle est donc le coût des nuitées», a déclaré Mohamed Boussaid, ministre du Tourisme et de l'Artisanat, à la presse locale. Les autorités entendent augmenter le volume de voyages réservés par les touristes nationaux par le biais du secteur formel à hauteur de 2 millions d'ici à 2010 (contre 1,1 million en 2003) et augmenter le nombre de nuitées enregistrées auprès des établissements d'hébergement classés à 6 millions. Dans le cadre de cette stratégie, il est prévu d'élargir l'offre de logements bon marché. Conformément aux attentes des Marocains, le gouvernement s'est engagé à augmenter le nombre de lits à un coût abordable à hauteur de 11 000 à l'horizon 2010, tandis que 19 000 lits en camping seront créés au niveau des sites les plus populaires auprès des touristes marocains. Selon le gouvernement, les prix de ces nouvelles résidences hôtelières varieront entre 200 et 500 dirhams (27 à 69 dollars) par nuit et par famille, tandis que monter sa tente coûtera la bagatelle de 150 dirhams (14 à 21 dollars). Par ailleurs, les agences de voyages marocaines sont encouragées à faciliter les réservations en gros, de manière à pouvoir faire bénéficier les touristes nationaux des mêmes prix bas que les touristes étrangers. Néanmoins, le Royaume doit faire face à un certain nombre de défis, notamment au niveau de la réglementation. En effet, il semblerait que beaucoup d'établissements hôteliers ne déclarent pas leurs véritables taux d'occupation pour éviter d'avoir à payer la taxe touristique locale, ce qui handicape à la fois la planification stratégique et le processus de blanchiment du marché noir. En outre, un facteur capital réside en dehors du contrôle des autorités : la menace terroriste. Le 11 juillet dernier, la police marocaine a dit avoir demantelé une cellule terroriste qui projetait des attentats contre des hôtels touristiques. Plusieurs arrestations ont également été réalisées au mois de mai. Suite aux attentats suicide de mai 2003 à Casablanca qui ont causé la mort de 45 personnes et suite aux attentats perpétrés l'année dernière, la nouvelle n'a point réjoui les hôteliers marocains et les tour-opérateurs. Néanmoins, la reprise depuis 2003 et la poursuite de la croissance cette année concourent à indiquer que l'industrie touristique est suffisamment solide pour surmonter la tempête. Le Maroc a choisi de suivre son propre chemin, en dehors des sentiers battus par les pays méditerranéens, en optant pour le développement d'établissements haut de gamme tout en misant sur le tourisme local. Une stratégie qui paraît économiquement viable alors que le revenu des Marocains augmente et que les touristes européens se tournent vers des destinations mariant exotisme et confort. Attendons de voir en 2010 si cette politique s'avère une réussite. • Oxford Business Group (21 juillet 2008)