Le logement social est une des solutions, si l'on parvient à «mixer» ; l'autre solution est d'investir massivement dans les quartiers populaires, mais à bon escient. Les maux qui touchent actuellement la jeunesse sont connus : chômage, exclusion, perte de repères, désœuvrement… En découlent conduites déviantes, état dépressif, immigration, absence de civisme, embrigadement… Un facteur vient aujourd'hui aggraver le sentiment de relégation : le risque de ghettoïsation urbaine. Contrairement à la génération des parents, notre jeunesse possède ses repères identitaires au sein même des quartiers: nos jeunes ne sont pas originaires de Doukkala, ou Oulad Ziane ou Oulad Saïd, non, ils sont les fils de Hay Mohammadi, Derb Soltane, Oulfa ou Médina Qdima ! Ils se sont fabriqué une culture urbaine : hip hop, rap, breakdance, graf… mais aussi mode vestimentaire et langage, une darija riche et très imagée. Mais en même temps, ces jeunes sont exclus – se sentent exclus- du monde du travail certes, mais aussi du logement, des loisirs. Ils souffrent également de difficultés au niveau de «l'identification» en l'absence de modèles valorisants, d'exemples positifs. J'étais cette semaine au cœur de «quartiers nouveaux» à Casablanca, érigés en lieux et places d'anciens bidonvilles: l'accompagnement social y est totalement défaillant ; les jeunes se regroupent en grappes aux pieds des immeubles ; le mode de vie bidonvillois perdure ; les «héros» sont les dealers, les délinquants ; une nouvelle forme de drogue y fait des ravages : le fameux maâjoune auquel sont mélangées des gouttes d'un produit médicamenteux pour «autistes»… Or, l'exemple, ô combien négatif de la France, devrait aujourd'hui nous inciter à la prudence: ne risquons-nous pas nous aussi le piège des «ghettos sociaux». En l'absence de mixité sociale, les inégalités sont aussi d'ordre territorial : les quartiers riches sont de plus en plus riches, les quartiers populaires se ghetttoïsent et les zones intermédiaires où vivent les classes moyennes s'appauvrissent. Le logement social est une des solutions, si l'on parvient à «mixer» ; l'autre solution est d'investir massivement dans les quartiers populaires, mais à bon escient. Or, aujourd'hui nombre de ces nouveaux quartiers ne possèdent aucun «lieu de vie», de convivialité, de socialisation, d'expérimentation : ni espaces verts, ni terrains de sport, ni maisons de jeunes ou centres culturels et sociaux… Notre jeunesse pousse entre béton et bitume ! Tout aussi important est l'encadrement de la population, là aussi, le fossé est béant, notamment concernant la jeunesse où nos adolescents grandissent comme une herbe folle. Pourtant, il est encore temps d'agir, d'inverser la tendance, nombreux sont ceux qui tirent la sonnette d'alarme, le Souverain lui-même avait mis en garde contre ce risque lors des dernières Assises de l'habitat à Agadir. L'une des meilleures préventions demeure l'association de la population, des habitants, à la conception et l'aménagement de leurs quartiers : avis aux entrepreneurs, urbanistes, élus, architectes…