Deux ans après l'ouverture de Guantanamo, le statut juridique des détenus de ce camp reste incertain. Alors que plusieurs organisations internationales s'y opposent, l'administration Bush continue à brandir le terrorisme comme prétexte du maintien de cette injustice. Détenues sans inculpation et sans avocat. Tels est le sort de quelques 660 détenus d'une quarantaine de nationalités, prisonniers du camp de Guantanamo. Un camp dont le deuxième anniversaire a été « célébré » dimanche dernier et que l'Administration américaine semble déterminée à maintenir, prétextant des impératifs liés à la guerre contre le terrorisme. Alors qu'aucun statut légal ne justifie l'existence d'un tel bagne, les Etats-Unis commencent à peine à mettre en place un cadre pour juger ces détenus par l'installation de tribunaux militaires. Washington ne reconnaît pas à ces détenus, pour la plupart capturés en Afghanistan dans le cadre de la lutte antiterroriste menée par les Etats-Unis, le statut de prisonnier de guerre et se réserve le droit de les garder en détention prolongée sans date de procès. Selon le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), une poignée de mineurs seraient à compter parmi les prisonniers. Les organisations de défense des droits de l'Homme continuent à dénoncer inlassablement les conditions draconiennes de détention au secret et l'illégalité de ces détentions à Guantanamo. Quelques milliers de personnes ont manifesté samedi à Barcelone en ce sens. L'ONG américaine Human Rights Watch et Amnesty International ont rappelé ces derniers jours leur indignation. Des parlementaires menés par le sénateur républicain John McCain ont écrit en décembre au secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld, pour demander que les prisonniers soient inculpés ou renvoyés dans leur pays pour y être jugés, dans les plus brefs délais. Mais l'opinion publique américaine, loin de se passionner pour cette question, reste à la marge de ces initiatives. Entre temps, l'injustice continue. Actuellement, seuls deux détenus de la base navale américaine de Guantanamo (Cuba), l'Australien David Hicks et un prisonnier d'origine yéménite, Salim Ahmed Hamdan, ont jusqu'à présent été autorisés à bénéficier d'un avocat militaire. Depuis l'ouverture du camp de détention, seuls 80 prisonniers, afghans pour la plupart, ont été libérés et rapatriés dans leur pays, tandis que d'autres sont arrivés pour occuper leurs cellules. Le magazine «Time» avait avancé fin novembre que les Etats-Unis s'apprêtaient à libérer prochainement quelque 140 détenus, parmi les cas jugés «les plus faciles» par les responsables militaires américains. Mais aucune décision allant dans ce sens n'a pour l'heure été prise. Entourée par un silence pour le moins complice de la communauté internationale, cette détention semble désormais faire l'objet de « demandes individuelles » de certains pays. A commencer par les alliés des USA. Le Premier ministre britannique Tony Blair a dit dimanche s'attendre à ce que le sort des neuf Britanniques détenus sur la base soit réglé « dans les prochaines semaines », sans préciser s'ils seraient rapatriés.