Les révélations de Morris Talansky sur les versements financiers qu'il a effectués en faveur d'Ehoud Olmert ont poussé le ministre travailliste de la Défense Ehoud Barak et la ministre Kadima des Affaires étrangères Tsippi Livni à exiger la tenue d'élections primaires au sein de Kadima, le parti dirigé par Ehoud Olmert. La déposition, devant le tribunal du district de Jérusalem, de Moshe Morris Talansky a fait l'effet d'une bombe sur la classe politique et l'opinion politique israéliennes. L'homme d'affaires juif américain a reconnu avoir versé plusieurs dizaines de milliers de dollars à Ehoud Olmert non seulement pour financer ses campagnes électorales mais aussi ses dépenses personnelles (voyages d'avion en première classe, séjours dans des palaces, vacances familiales en Italie, etc..) Ces révélations ont poussé la ministre Kadima des Affaires étrangères, Tsippi Livni, et le ministre travailliste de la Défense, Ehoud Barak, à porter le coup final au chef du gouvernement. L'un et l'autre ont exigé, séparément, la démission du Premier ministre et l'organisation de primaires au sein de son parti, Kadima, pour désigner son successeur. Faute de quoi, a prévenu Ehoud Barak, les Travaillistes en tireront les leçons qui s'imposent et quitteront la coalition gouvernementale, provoquant la tenue d'élections législatives anticipées. Cette menace n'est à prendre à la légère. Un hebdomadaire israélien a cru même pouvoir affirmer que le travailliste Ehoud Barak s'était mis secrètement d'accord avec le chef de l'opposition, Benyamin Netanyahou, pour fixer au 11 novembre 2008 la date du futur scrutin législatif. Car Ehoud Barak n'entendrait pas se contenter d'un simple replâtrage du gouvernement et de la probable désignation comme Premier ministre de Tsippi Livni, la très populaire ministre des Affaires étrangères, quasiment assurée de l'emporter sur ses rivaux lors des primaires de Kadima : Shaül Mofaz, Avi Dichter ou Méir Chetrit, originaire du Maroc. Pour plusieurs analystes, Ehoud Barak est convaincu et aurait convaincu ses camarades de l'Avoda, le Parti travailliste, qu'il ne pourra revenir au pouvoir qu'une fois levée « l'hypothèque Kadima», c'est-à-dire l'existence d'un parti de centre gauche disputant aux Travaillistes le rôle de champion du camp de la paix et d'un règlement négocié du conflit israélo-arabe. Les sondages donnent tous comme vainqueur probable des prochaines élections, à une courte majorité, le Likoud de Benyamin Netanyahou, associé aux religieux et au parti russophone Israël Beïtenou . Mais Ehoud Barak estimerait que l'ancien Premier ministre de droite ne sera pas en mesure de constituer un gouvernement durable. Il devra, tôt ou tard, retourner devant les électeurs, permettant ainsi au dirigeant travailliste d'apparaître comme le seul recours possible pour un Israël en proie à de multiples difficultés et à une dégradation sensible de sa situation sécuritaire. Car, dans tous les cas de figure, le départ probable de Ehoud Olmert risque de se traduire par l'interruption, momentanée ou définitive, des négociations bilatérales israélo-palestiniennes. Et, encore plus, les discussions israélo-syriennes menées sous l'égide de la Turquie. De nombreux observateurs, tant israéliens que palestiniens, estiment que la perspective d'aboutir à un accord entre Israël et l'Autorité palestinienne avant le départ, début 2009, de George Bush de la Maison-Blanche, s'éloigne définitivement. Cette situation pourrait avoir de nombreuses incidences sur la situation sécuritaire et entraîner une radicalisation des Palestiniens, furieux de voir s'éloigner une réelle chance de paix. A ce stade, l'actuelle crise confirme le jugement sévère jadis porté par le Secrétaire d'Etat américain Henry Kissinger : «Israël n'a pas de politique étrangère mais uniquement une politique intérieure». Les semaines à venir risquent de le démontrer une fois de plus.