Face à la menace nucléaire iranienne, les appels à l'ouverture du dialogue se multiplient au Machrek même si chacun des protagonistes cherche avant tout à préserver ses intérêts ou à affaiblir ses voisins. L'obstination de l'Iran à vouloir se doter de l'arme nucléaire tactique provoque une véritable effervescence diplomatique au Proche-Orient, qui n'est plus désormais la chasse gardée des seuls Etats-Unis empêtrés dans le bourbier irakien. Après plusieurs années d'effacement, consécutives à l'effondrement de l'ex-Union soviétique, la Russie est de retour en Méditerranée orientale et s'efforce de renouer ses liens avec différents pays, notamment l'Egypte, Israël ou les émirats du Golfe. Sous cet angle, les voyages effectués par le raïs Hosni Moubarak à Moscou et par le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, au Caire, à Tel-Aviv et à Damas, ont permis aux Russes de reprendre le pouls de la région et de jouer un rôle actif dans différents dossiers. C'est ainsi que Moscou a transmis au Premier ministre israélien un message du président syrien Bachar al Assad relatif à la réouverture d'un dialogue entre Damas et Tel-Aviv. Le cadre de ces discussions pourrait être la conférence de paix régionale que la Russie veut organiser dans sa capitale avant la fin de l'année 2 008 et qui traiterait essentiellement de l'avenir du plateau du Golan occupé par Israël depuis 1967. En dépit de plusieurs réserves, les Israéliens n'ont pas dit non car ils voient dans la reprise du dialogue avec le régime syrien une opportunité de détacher Damas de Téhéran. Bachar al Assad, lui, estime que des concessions de sa part permettraient à son pays de réintégrer la scène diplomatique internationale et de sortir de son isolement. Un isolement symbolisé par le refus de nombreux chefs d'Etats et souverains arabes d'assister au sommet de la Ligue arabe à Damas en fin de semaine. L'Egypte cherche à tirer profit de cet isolement pour reprendre le dialogue avec Moscou qui fut autrefois son allié et s'imposer comme le principal interlocuteur de la Russie au Proche- Orient. A ceci près que l'Arabie Saoudite, à l'origine de l'initiative de paix arabe adoptée lors du Sommet de Ryad en mars 2007, n'entend pas laisser au Caire le monopole de l'action à l'échelle régionale. Le roi Abdallah d'Arabie Saoudite a lancé un appel en vue de la réunion dans son pays d'un sommet intereligieux réunissant les représentants des trois grandes religions monothéistes: islam, christianisme et judaïsme. Cette initiative, soutenue par le Vatican, le Conseil œcuménique des Eglises protestantes et par le grand rabbinat d'Israël, veut en quelque sorte dresser un barrage multiconfessionnel contre la progression du fondamentalisme chiite et de l'influence iranienne. Une progression favorisée, selon le président égyptien Hosni Moubarak, par le pourrissement de la situation à Gaza et l'impasse dans laquelle se trouveraient les actuels pourparlers israélo-palestiniens. On ne s'étonnera donc pas d'apprendre que la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, s'apprête à revenir dans la région pour relancer les discussions entre le gouvernement israélien et l'Autorité palestinienne. Cette relance pourrait être favorisée par les mesures prises par Ehoud Barak, le ministre israélien de la Défense, en vue d'alléger les conditions de vie des Palestiniens de Cisjordanie et renforcer le pouvoir de Mahmoud Abbas. Certains responsables israéliens de haut niveau laissent même entendre, sous le couvert d'un prudent anonymat, que des progrès significatifs auraient été enregistrés dans les discussions entre la ministre israélienne des Affaires étrangères Tsippi Livni et l'ancien Premier ministre palestinien Ahmed Qoreï. Ces progrès seraient les bienvenus au moment où beaucoup redoutent une escalade de la violence à l'initiative du Hezbollah libanais bien décidé à venger la mort de son secrétaire général-adjoint Imad Moughniyeh et à contrecarrer, sur ordre de Téhéran, l'esprit de dialogue qui souffle sur la région.