A la mort du Generalismo Fransisco Franco, Caudillo de España por la gracia de Dios, l'Espagne décida de fermer la parenthèse et de ne pas toucher aux plaies. Contrairement à ce qui s'est passé au Maroc, majorité comme opposition inscrirent l'amnésie au programme de leurs formations respectives. Le juge espagnol Baltasar Garzón a décidé d'accepter la plainte d'une association sahraouie mettant en cause le Maroc dans sa lutte contre les séparatistes du Polisario au Sahara. C'était mardi dernier avec orchestration de manière à ce que l'annonce de cette acceptation, consigne dans ce sens en a été donnée à la presse de son pays, coïncide avec l'arrivée du prince héritier d'Espagne au Maroc. Bien sûr, toute ressemblance avec la démarche du juge français dans l'affaire Benbarka lors de la visite du président de la France au Royaume, n'est que le fruit du hasard. Mais il y a une autre coïncidence qui semble échappé au magistrat madrilène. Son action intervient au moment où à Rome le Vatican procédait à la béatification de 498 religieux qui avaient été exécutés en 1936 et 1937 par les républicains pour collision avec le fascisme franquiste, tandis qu'à Madrid, le chef du gouvernement, le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero, faisait voter par le Parlement de son pays la réhabilitation des victimes du franquisme soit parce qu'ils s'étaient rangés du côté des républicains pendant la guerre civile, soit parce qu'ils s'étaient opposés à la longue dictature de Franco. Des centaines de milliers de morts. Quel rapport ? Aucun, si ce n'est que pour s'occuper, Baltasar Garzón a beaucoup à faire avec les annales de son pays. Un peu d'histoire, mais très sommairement. En avril 1931, les républicains remportent les municipales et proclament la 2ème république. Au fil des législatives, l'alliance socialo-communiste prend du poids et du volume et entend s'accaparer tous les pouvoirs. Cette république qui déplaît déjà fortement à la droite monarchiste et aux Phalanges espagnoles largement soutenues par l'Eglise, devient carrément insupportable à leurs yeux. Au pays de l'Opus Dei, la croisade, selon le propre terme d'un évêque, pouvait commencer. L'insurrection qui s'en suivra plongera le pays en 1936 dans une guerre civile sans merci. Une horreur éloquemment immortalisée par l'œuvre de Picasso sur Guernica. Le clan des républicains est soutenu par l'Union soviétique et l'internationale à obédience communiste. Les autres par l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste. Des deux côtés, que du beau monde dont le faible pour la démocratie est passé dans la légende. En avril 1939, le guerre s'achève par la victoire de Franco. C'est, au plan politique, le début d'une longue nuit de quarante ans. Une main de fer dans un gant d'acier qui fera des milliers de disparus et de morts. A la mort du Generalismo Fransisco Franco, Caudillo de España por la gracia de Dios, l'Espagne décida de fermer la parenthèse et de ne pas toucher aux plaies. Contrairement à ce qui s'est passé au Maroc, majorité comme opposition inscrirent l'amnésie au programme de leurs formations respectives. Militaires et civils décidèrent de regarder l'avenir. Il n'y a pas lieu de trouver à redire sur ce choix. L'approche est difficile d'autant plus que l'action économique et sociale de Franco a paradoxalement qualifié l'Espagne à intégrer l'univers de la démocratie et l'espace européen. Et personne de ce côté-ci de la Méditerranée ne demande la convocation de la mémoire de Franco ou de ses survivants pour s'expliquer sur leurs méfaits. A peine, peut-être, oserions-nous suggérer au juge Garzón, s'il se sent vraiment envahi par le désœuvrement, de chercher les responsables espagnols de la première utilisation des gaz toxiques dans l'histoire du monde. Un crime contre l'humanité. C'était au Rif marocain. Par l'armée espagnole.