Condoleezza Rice, accompagnée de Robert Gates, secrétaire d'Etat américain à la Défense, entame sa cinquième tournée dans la région du Golfe et du Moyen-Orient. Objectif : préparer la rencontre internationale sur la question palestinienne. La tournée qu'a entamé, hier lundi, Condoleezza Rice dans la région du Golfe et du Moyen-Orient, la cinquième depuis le début de l'année, revêt une importance capitale pour la diplomatie américaine, surtout pour une administration républicaine qui s'apprête à déclencher le compte à rebours de son existence. Enjeu majeur de ce déplacement, la préparation de la rencontre internationale sur la question palestinienne annoncée avec fracas par George Bush pour l'automne prochain à Washington et l'élaboration, avec des alliés arabes, d'une politique de lutte contre l'influence croissante de l'Iran dans la région. Signe supplémentaire de la détermination américaine à faire bouger les lignes, Condoleezza Rice est accompagnée par le secrétaire d'Etat à la Défense Robert Gates. Cette tournée a été précédée par le réveil d'une crise qui sommeille depuis des années entre Washington et Riyad provoquée par les informations publiées par le «New York Times» selon lesquelles les officiels américains accusent en privé les Saoudiens de leur compliquer la tâche en Irak, en boycottant le Premier ministre Nouri Al Maliki et en aidant au financement direct ou indirect de la rébellion sunnite. Devant l'ampleur des accusations et de leurs possibles conséquences, l'administration Bush s'est condamnée à une mise au point sans nuances : «Nous avons des relations très fortes en matière de contre-terrorisme (…) Nous collaborons très étroitement avec l'Arabie Saoudite». Condoleezza Rice aura donc autant à sermonner les autorités saoudiennes qu'à tempérer leur courroux. Elle emmène dans sa besace un gigantesque contrat d'armement militaire de 20 milliards de dollars, enfin ficelé après de longs mois de négociations et d'hésitations et dont le retard était dû aux inquiétudes formulées par les Israéliens de voir Washington équiper l'Arabie Saoudite d'armes «intelligentes», guidées par une haute technologie de précision. Le «Washington Post» cite les explications anonymes d'un responsable américain qui éclaire cette décision : «Nous sommes attentifs aux besoins de nos alliés et à ce que chacun dans la région considère être une démonstration de force d'un Iran plus agressif (…) L'un des moyens de faire face à ça, c'est de renforcer nos alliés et amis». L'Arabie Saoudite se trouve au centre de grandes manœuvres diplomatiques américaines. Sur deux fronts vitaux, Riyad est sollicité pour jouer un rôle décisif. Sur la question palestinienne, les pressions sont de plus en plus grandes sur l'Arabie Saoudite de s'ouvrir sur Ehud Olmert et de pratiquer un effet d'entraînement sur les autres pays dits modérés qui gravitent dans son sillage. La non reconnaissance d'Israël par un des pays les plus intimement liés aux Etats-Unis devient un fardeau aussi lourd à porter qu'à expliquer. Pour la diplomatie américaine, l'exploit du moment à réaliser, pour donner un semblant d'avance dans le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens, est de pouvoir organiser une rencontre au sommet entre le Roi Abdallah et Ehud Olmert. A mesure que l'impasse avec les Palestiniens prend des proportions insurmontables, la presse israélienne ne cesse de fantasmer sur un tel cliché et le considère comme la seule et vraie grande évolution du dossier de la paix au Proche-Orient. Sur la question irakienne et malgré l'antipathie et le peu d'estime qu'elle semble éprouver à l'égard de Nouri El Maliki, l'administration Bush voudrait l'imposer à l'ensemble des pays de la région comme l'incontournable interlocuteur irakien à choyer. Et même quand, en janvier dernier, lors d'une réunion à haut niveau, les Saoudiens avaient présenté aux Américains des documents écrits prouvant que le Chiite Nouri Al Maliki était un agent iranien et n'était pas digne de confiance, l'administration Bush avait réagi avec effroi et incrédulité, accusant les autorités saoudiennes d'avoir fabriqué ces prétendues preuves. S'ouvrir sur Ehud Olmert, collaborer avec Nouri El Maliki, prendre ses distances avec la Syrie tout en fédérant un front arabe à vocation militaire anti-iranien, Condoleezza Rice attend des autorités saoudiennes qu'elles osent enfin s'impliquer sérieusement dans leur stratégie quitte à se livrer à un dangereux grand écart.