Le recours au langage des menaces est un aveu d'échec de la part du Polisario, confronté à ses problèmes internes et à son isolement sur le plan international, affirme Mohamed Talib, membre du CORCAS. Entretien. ALM : Le Polisario menace de reprendre les armes en automne prochain en cas de maintien du statu quo sur la question du Sahara. Qu'en pensez-vous ? Mohamed Talib : Ce n'est pas la première fois que le front Polisario recourt au langage des menaces. Ce mouvement ne fait que reprendre une vieille sérénade, surtout qu'il a maintenant le dos au mur. Il a des problèmes internes et il essuie un échec flagrant à l'échelle internationale. Quant à la « capacité » de ce mouvement à mettre sa menace en exécution, il n'en est tout simplement rien. Le Polisario sait bien qu'il ne peut pas mettre cette menace en œuvre face à la vigilance des Forces Armées Royales et devant la mobilisation du peuple marocain. En plus, il sait bien que l'Algérie, qui est son tuteur, n'acceptera en aucun cas l'exécution de ces menaces, compte tenu de ses nombreux problèmes internes (forte présence de l'organisation terroriste Al Qaïda, porosité des frontières algériennes, devenues un terreau propice à toutes sortes de trafics, etc). Le Polisario sait bien également qu'une guerre dans la région ne sera jamais acceptée par la communauté internationale. Elle sera une mauvaise aventure pour le Polisario, qui s'est longtemps proclamé un « mouvement pacifique » et « respectueux de la légalité internationale ». Etes-vous d'accord avec ceux qui sont pour un dialogue direct avec la direction du Polisario ? Les gens de Tindouf sont certes nos frères. Mais cela ne m'empêche pas de m'interroger sur l'utilité de ce dialogue surtout avec les menaces du retour aux armes. Je me demande en même temps si les dirigeants du Polisario sont libres de leurs décisions. Je préfère dialoguer avec l'Algérie qu'avec les dirigeants du Polisario. Mais encore faut-il trouver un interlocuteur ouvert et constructif. Malheureusement, le temps s'est arrêté en Algérie. Ce pays, paraît-il, a de la peine à assimiler l'évolution qui se fait autour de lui. Franchement, le seul interlocuteur qu'il peut présenter, c'est la junte militaire. Il faudrait peut-être attendre que la société algérienne se remette de ses années de plomb et de sang pour ouvrir les canaux de dialogue et de communication. Personnellement, je crois que le Maroc peut parier sur un éveil de la société algérienne. C'est simplement une question de temps. A quelle résolution vous attendez-vous de la part du Conseil de sécurité au sujet du Sahara ? Il ne faut pas s'attendre à une solution-miracle. Je pense que le Conseil de sécurité va s'en tenir à souligner l'aspect positif de l'initiative marocaine, appeler les parties à négocier et soutenir le rapport du secrétaire général des Nations unies sur l'affaire en décidant la reconduction pour six mois supplémentaires du mandat de la Minurso. Que peut faire le Maroc face à cette perspective ? Maintenant, on peut dire que le Maroc a réussi. Il a pris les choses en main et présenté un projet crédible, qui respecte les normes et standards internationaux en matière d'autonomie. L'initiative marocaine a, par ailleurs, permis de dévoiler devant la communauté internationale la face cachée de l'Algérie qui prétendait une « neutralité » dans l'affaire du Sahara. Pourtant, la réussite diplomatique réalisée par notre pays ne doit pas nous inciter à dormir sur nos lauriers. Le chemin est encore long à parcourir. L'Etat doit assumer sa responsabilité pour résoudre tous les problèmes sociaux de la région, dont notamment les problèmes des diplômés chômeurs, l'habitat, la pêche et les phosphates.