Tiznit a connu récemment la distribution, à large échelle, d'un appel portant la signature de jeunes de la ville et menaçant des personnes, associations et partis. Le texte appelle à "punir" ce qu'ils considèrent comme des mécréants. Un nouvel appel à l'excommunication et au meurtre. Tiznit a vécu ces derniers jours au rythme de la distribution, à large échelle, d'un communiqué sous forme d'un appel qui s'en prend à plusieurs personnes, des associations et des partis. Attribué aux "élèves et jeunes de Tiznit", il renferme de graves menaces contre la poétesse Hakima Chaoui, l'AMDH (Organisation marocaine des droits de l'Homme), l'association "Al Oufouk", l'association "Achouala", mais aussi les partis Annahj et le PADS (le parti de l'avant-garde démocratique et socialiste). Dans le même lot des têtes mises à prix, et vouées à la haine et ce qui s'ensuit, on retrouve l'USFP, le délégué de l'Education nationale et le directeur du lycée "Al Massira Al Khadra". Ces derniers sont qualifiés de "mécréants", de "traîtres" et d'"hypocrites". Tout ce beau monde, selon le texte de cet appel dont ALM a eu copie, est coupable d'avoir organisé une conférence au lycée pré-cité en plus d'une soirée poétique, le 18 mars 2006, avec la participation de Hakima Chaoui, celle-là même qui s'était attirée les foudres des islamistes, depuis plusieurs années, à Témara, Khénifra et lors des débats autour du Plan d'intégration de la femme. Les intégristes ne lui ont jamais pardonné un poème, lu à la radio nationale, et quelques vers où ils jugent que la poétesse a "blasphémé" le Prophète. Ils ont tenu à se rappeler à son souvenir à Tiznit. Mais en élargissant le cercle des "excommuniés" pour englober fonctionnaires publics, associations légales et partis politiques. Ces derniers sont menacés d'une véritable guerre, versets du Coran – décontextualisés – à l'appui avec force imprécations et insultes. "Nous, jeunes de Tiznit, nous leur déclarons la guerre", lit-on dans l'appel diffusé dans la ville et notamment dans les établissements scolaires à quelques jours seulement de la commémoration du troisième anniversaire des attentats de Casablanca. Dans une réaction à la diffusion de cet appel, Abdellatif Ouammou, maire PPS de Tiznit, dit son dépit de voir cette ville, épargnée jusque-là par ce phénomène, être le théâtre à son tour de telles manifestations de violence verbale et d'intimidation. Pour Ouammou, qui s'exprime dans un communiqué rendu public récemment, ce genre de pratiques vise à mettre tout le monde sous tutelle et va dans le droit fil d'appels similaires, et récents, à sévir contre les festivals, la culture et, par extension, toutes les manifestations de joie et de tolérance qui ont toujours caractérisé cette ville du Sud. Le maire de Tiznit condamne notamment l'usage, abusif, fait de plusieurs versets du Coran et où il n'est question que de châtiments et de supplices. Cet appel à la haine, et au meurtre, n'est pas le premier du genre. Depuis la fin de l'accalmie qui avait suivi les attentats de Casablanca, la "mode" des écrits takfiristes a regagné du terrain, avec plus d'insolence et sur un ton des plus véhéments. La chose semble même devenir un fait banal. Des écrits pareils, mais aussi des courriers électroniques, ont poussé la "barre" jusqu'à s'en prendre à plusieurs responsables gouvernementaux, cités nommément et désignés comme les ennemis de l'Islam. Pour Hassan Tarik, S.G de la Chabiba USFP (voir entretien ci-contre), l'Etat doit assumer ses responsabilités par les mécanismes que garantissent les lois nationales pour instruire et punir de tels actes. La législation marocaine anti-terrorisme sanctionne l'apologie du terrorisme par quelque voie que ce soit. D'autres législations incriminent les appels à la violence ou l'atteinte aux biens et à l'intégrité physique d'autrui.