Abdelkader, 44 ans, père de trois enfants, a tué sa femme à coups de bâton après l'avoir surprise dans le lit de son voisin. Il a été condamné à 15 ans de réclusion criminelle. La Chambre criminelle près la Cour d'appel d'El Jadida. La salle d'audience est archicomble. Abdelkader, quarante-quatre ans, est au box des accusés. Son accusation est l'homicide volontaire avec préméditation et guet-apens. Il risque une peine très lourde, allant jusqu'à la peine capitale. Les membres de sa famille n'ont pas encore compris comment il est arrivé à tuer sa femme. Certes, ils sont convaincus qu'elle a porté atteinte à son honneur. Seulement, ils n'ont jamais pensé qu'il réagisse ainsi. Ils savent qu'il est une personne raisonnable, qui ne réagit qu'après demande de mille conseils. Comment cette fois-ci, Abdelkader n'a pas pris en considération ses trois enfants qui vont rester seuls, sans mère ni père et sans la moindre assistance ? Il n'avait jamais de problèmes avec sa femme qu'il a épousée depuis une vingtaine d'années. Ils sont issus du même douar, à la périphérie d'El Jadida. Quand il l'a vue, quand elle est arrivée à l'adolescence, il a décidé de se marier avec elle. Pour ce faire, il a trouvé refuge chez sa mère. Cette dernière était pleine de joie quand il lui a demandé de se présenter à la famille de Khadija afin de la demander en mariage. C'est elle qu'elle espérait que son fils épousera. Car Khadija est issue d'une famille qui jouit d'une bonne réputation dans son douar, bien éduquée, ayant un niveau scolaire de sixième année d'enseignement fondamental et belle. La mère n'a pas tardé une minute pour se présenter chez la famille et la demander en mariage. En quelques mois, Abdelkader et Khadija se sont retrouvés sous le même toit. De fil en aiguille, leur aîné a vu le jour, puis leur deuxième enfant et le troisième. Quand il s'est tenu devant la cour, il n'a pas baissé sa tête, il a avoué avoir tué sa femme, mère de ses trois enfants. Il n'avait pas le choix, explique-t-il à la cour. Pourquoi et comment ? Abdelkader a expliqué tout, sans hésitation. Il vivait en paix avec sa femme et ses trois enfants, faisait son possible pour subvenir à leur besoin au point qu'il ne pense qu'à eux et qu'à leur avenir. Il n'a jamais pensé trahir sa femme ou porté atteinte à son honneur depuis son mariage. Il était toujours fidèle à elle et à son foyer. Au fil des années, un ami à lui et voisin du douar est venu lui demander de répudier sa femme. Pourquoi ? Son ami a hésité de lui expliquer au départ le mobile. Mais Abdelkader a insisté. Nul ne peut répudier sa femme sur la base du conseil d'un tiers bien qu'il soit son ami intime. Khadija est en relation amoureuse avec un autre homme, lui affirme-t-il sur un ton hésitant. Abdelkader n'a pu croire ses oreilles. Cet ami ment-il ? Quel est son intérêt ? s'interroge Abdelkader. Son ami lui a assuré qu'il ne lui révèle que la vérité. Pour le convaincre, il lui a expliqué qu'il doit la guetter, vendredi vers 16h. La semaine suivante, Abdelkader n'a pas raté l'occasion. De loin, il a guetté sa femme, qui est sortie de chez elle pour aller quelques quatre cents mètres et accéder à la maison de la famille de Rahal. Un quart d'heure plus tard, Abdelkader, un bâton à la main, a frappé à la porte. Quand Rahal lui a ouvert, il est rentré en hâte pour trouver sa femme dans son propre lit. L'œil dans l'œil, Khadija a descendu du lit en tremblant. Rahal les a rejoints, a tenté, sans pudeur, de calmer Abdelkader. Ce dernier lui a asséné un coup de bâton sur la tête avant de tourner vers sa femme et a commencé à lui administrer de multiples coups jusqu'au point où elle s'est effondrée. A ce moment, Rahal est sorti en courant à destination du commandement de la gendarmerie Royale. Alertée, cette dernière s'est dépêchée sur les lieux pour se trouver devant Khadija, un corps sans âme et Abdelkader près de son cadavre. Abdelkader qui a reconnu son crime a expliqué à la cour qu'il ne regrette que d'avoir laissé ses trois enfants sans le moindre sou et a réclamé un jugement clément. Pourquoi une telle clémence ? a demandé le représentant du ministère public qui a requis la peine maximale contre le mis en cause. Pour lui, Abdelkader ne devait pas passer à l'acte, car il y a une justice qui assume cette responsabilité. Contrairement à l'avocat de la défense qui a requis une peine atténuante. Car, selon lui, l'article 418 du code pénal stipule que « Le meurtre, les blessures et les coups sont excusables s'ils sont commis par l'époux sur son épouse ainsi que sur le complice à l'instant où il les surprend en flagrant délit d'adultère. ». Après délibérations, la Cour a jugé Abdelkader coupable et l'a bénéficié des circonstances atténuantes pour le condamner à 15 ans de réclusion criminelle. Quant à Rahal, il a écopé d'un an de prison ferme pour adultère.