Pour Abdellah Khamiss, président de l'Union de l'enseignement et de la formation privés au Maroc, l'enseignement privé a besoin davantage de soutien et d'encouragement, compte tenu de sa mission importante dans le domaine de la formation. ALM : La conclusion d'un accord-cadre de l'enseignement privé bute sur la question de la fiscalité. De quoi s'agit-il au juste ? Abdellah Khamiss : Vous savez que la dette accumulée par le secteur s'élève à 300 millions de DH depuis 1998. C'est énorme. Lors de la dernière réunion à la Primature, le Premier ministre nous a soumis une proposition pour régler ce problème. Sachant que 90 % de la dette est enregistrée chez 22 % des établissements à travers le pays, Driss Jettou ne veut faire payer que ceux qui ont les moyens. Mais, on reste un seul secteur ! Nous tenons à ce que toutes les écoles bénéficient d'une opération d'exonération totale des impôts ainsi que des arriérés. De quelle manière le secteur s'est-il comporté auparavant avec le fisc ? Aujourd'hui, la majorité des propriétaires d'écoles privées n'arrivent pas à payer leurs impôts. Le problème remonte à l'année 1975. Avant cette date, le secteur a été exonéré d'impôts. Il a même été encouragé à travers l'octroi de bourses. En 1997, le gouvernement de l'Alternance nous a gratifiés d'une décision selon laquelle les impôts ainsi que les arriérés enregistrés avant 1997 ne seront plus pris en compte. C'est ainsi que nous avons commencé une nouvelle étape, mais sans toutefois prendre en considération les particularités de ce secteur. Aucune réforme n'a été menée. Un grand nombre d'écoles à travers le pays sont menacées aujourd'hui de fermeture. Certains n'arrivent pas à comprendre comment vous n'arrivez pas à payer vos impôts, alors que l'enseignement privé génère un chiffre d'affaires important ? On se focalise sur les gains dégagés, mais il ne faut pas oublier le rôle fondamental qu'accomplit ce secteur au service de la formation des cadres. Il faut prendre en considération la nature du produit proposé. L'enseignement privé allège le public. Vous savez que chaque élève dans un établissement scolaire étatique «coûte» à l'Etat 3.500 Dh par an. Au collège, il faut compter entre 8.000 à 9.000 Dh par an pour chaque collégien. Et la somme atteint les 14.000 Dh pour chaque lycéen. Avec ces statistiques, il paraît clairement que l'enseignement privé contribue à l'allègement de la facture supportée par le Trésor. Pour l'enseignement supérieur, la somme est encore plus importante. C'est pour cela qu'il faut encourager davantage le secteur privé. Vous dites qu'il y a des écoles qui sont menacées aujourd'hui de fermeture. Comment arrivent-elles alors à tirer leur épingle du jeu ? Aux dépens des droits des enseignants ! Au Maroc, on compte aujourd'hui 1672 écoles privées rien que dans le primaire. Elles sont présentes un peu partout à travers le Royaume. Là, il faut prendre en considération le service rendu à la société, parce que les gains enregistrés pour bien des écoles leur permettent seulement de continuer à exister. En aucun moment il n'y a eu un bon retour sur investissement. Il faut rappeler aussi que l'enseignement privé au Maroc regroupe l'enseignement général (primaire, collège et lycée), l'enseignement supérieur ainsi que la formation professionnelle. Au total, il y a près de 4.000 établissements privés dans l'ensemble du pays. Quels sont les autres points de ce projet d'accord-cadre ? En fait, il y a deux volets dans nos propositions. Le volet relatif à la dette ainsi qu'un autre sur les moyens d'encouragement du secteur. En effet, l'une des plus importantes dispositions de ce projet d'accord-cadre est consacrée au rôle de l'enseignement privé. C'est ainsi que l'on s'attend, à l'horizon 2010, à ce que la part de ce secteur atteigne 20 %. Nous sommes actuellement à seulement 5 %. Mais les choses étant ce qu'elles sont, je doute que nous puissions atteindre cet objectif.