Le gouvernement français a décidé de recourir au couvre-feu pour mettre fin aux émeutes qui ne cessent de s'étendre. La presse européenne craint une exportation des troubles vers d'autres pays du vieux Continent. Face à la montée incessante de la violence en France, le recours au couvre-feu est désormais officiel. À l'issut d'un conseil des ministres, le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, a annoncé que la décision de principe sur l'instauration d'un couvre-feu dans les zones qui le nécessitent, avait été prise. «Je vous confirme que la décision de principe a été prise. Nous verrons au fur et à mesure de l'évolution des événements à son application ciblée sur une partie du territoire national», a-t-il déclaré. M.Sarkozy a ajouté que, conformément à ces dispositions, des perquisitions allaient être possibles durant douze jours lorsqu'il y aura "suspicion" de détention d'armes dans les banlieues. Le Premier ministre français Dominique de Villepin avait annoncé la veille que les préfets pourront instaurer des couvre-feux, dès mercredi, pour rétablir l'ordre dans les banlieues, qui ont connu leur 12ème nuit d'émeutes avec 1.173 véhicules incendiés et 330 interpellations. Selon le dernier bilan de la police mardi matin, douze policiers ont été légèrement blessés, contre 34 la nuit précédente. Le Premier ministre avait expliqué sur la chaîne de télévision TF1 que le gouvernement allait réactiver des dispositions de la loi de 1955 instaurant l'état d'urgence, alors en pleine guerre d'Algérie, et annoncé un renfort de 1.500 réservistes, gendarmes et policiers, portant à 9.500 le nombre d'hommes mobilisés pour les émeutes. Pour le président français Jacques Chirac, la décision d'instaurer des couvre-feux était "nécessaire pour accélérer le retour au calme". D'après le porte-parole du gouvernement, Jean-François Copé, c'est le président qui avait demandé de mettre en œuvre ces mesures "au plus vite". «Les préfets pourront – notamment sur les territoires où cette décision s'impose – instaurer des couvre-feux,» a dit le chef de l'Etat. «Mais la primauté de la loi va nécessairement de pair avec la justice, ce n'est qu'en donnant toute sa réalité à ce principe fondamental de la République que nous dépasserons la situation actuelle» , a-t-il ajouté. Jacques Chirac a affirmé que l'Etat avait "le devoir d'agir" pour ceux qui "par désillusion et manque de repères sont tentés par le repli" . Alors que le gouvernement tente par tous les moyens de restaurer le calme après une douzième nuit d'émeutes, la quasi-majorité de la presse européenne craint l'exportation des troubles. «L'expansion rapide des désordres se propageant des banlieues parisiennes à des villes telles que Toulouse (sud-ouest) et Strasbourg (est) offre peu de place à la confiance des pays voisins qui ont d'importantes populations d'immigrés, un code du travail rigide, des élites politiques égoïstes et une croissance économique stagnante,» écrit le quotidien britannique Daily Telegraph. De son côté, le Guardian charge le ministre français de l'Intérieur Nicolas Sarkozy, en rappelant que ce dernier avait déclaré qu'il fallait "nettoyer les banlieues de la racaille". Avec de telles déclarations, s'interroge le journal, «peut-on s'étonner que le racisme en France soit plus virulent qu'au Royaume-Uni ?». En Allemagne, où vit également une forte communauté d'immigrés, principalement turcs, les quotidiens s'inquiétaient d'une possible importation des émeutes urbaines. «Nous avons aussi nos expériences de la violence des jeunes, avec les jours de chaos à Hanovre et les nuits de Kreuzberg le 1er mai. Mais même si les premières voitures ont brûlé la nuit dernière à Brême et à Berlin, nous n'avons encore jamais eu de flambée de violence anarchique,» affirme le quotidien économique Handelsblatt. En Italie, la décision du gouvernement français d'instaurer un couvre-feu et de mobiliser de nouvelles unités de policiers, pour lutter contre les violences dans les banlieues après le décès d'un sexagénaire roué de coups par des émeutiers, fait la une mardi des grands quotidiens. "Oui au couvre- feu, non à l'armée", titre le Corriere della Sera. Enfin, les principaux journaux espagnols mettent l'accent dans leur version électronique sur le recours autorisé au couvre-feu.