Visiblement, la sortie médiatique du président français Jacques Chirac n'a pas permis l'apaisement des esprits après onze nuits d'émeutes. L'état d'urgence devient ainsi de plus en plus probable. Après dix jours d'émeutes, les plus graves qu'a connu la France depuis les évènements de mai 1968, le président français Jacques Chirac est enfin sorti de son silence prônant fermeté face aux fouteurs de troubles. Lors de son allocution dimanche soir, Jacques Chirac a annoncé un nouveau renforcement de "l'action de la police et de la justice" face aux violences urbaines qui se sont étendues à plusieurs villes de la République. «Le dernier mot doit revenir à la loi», a déclaré le chef d'Etat, dans sa première intervention publique. Il a assuré que «ceux qui veulent semer la violence ou la peur (...) seront appréhendés, jugés et punis». «Mais nous comprenons bien aussi que l'évolution des choses suppose le respect de chacun, la justice et l'égalité des chances. Et nous sommes tout à fait déterminés à aller dans cette voie et à poursuivre l'effort engagé dans ce domaine», a ajouté le président français. «Mais il y a un préalable, c'est une priorité (...), il s'agit du rétablissement de la sécurité et de l'ordre public». Critiqué pour son silence par l'opposition, le président Chirac s'exprimait pour la deuxième fois depuis le 27 octobre, date de la mort accidentelle de deux adolescents d'origine immigrée dans la banlieue nord de Paris, qui a marqué le début de la crise. Le bilan définitif publié par la police lundi, qui fait état de 34 policiers blessés, s'établit à 1.408 véhicules incendiés et 395 interpellations dans toute la France. «Nous avons pris un certain nombre de décisions de nature à renforcer encore l'action de la police et de la justice car, aujourd'hui, la priorité absolue c'est le rétablissement de la sécurité et de l'ordre public», a déclaré le président Chirac après une réunion d'urgence du Conseil de la sécurité intérieure, chargé de coordonner la lutte contre la délinquance et le terrorisme. Le Premier ministre Dominique de Villepin a, pour sa part, précisé que "les dispositifs de sécurité" seraient renforcés "partout sur le territoire où cela est nécessaire". «Nous ne pouvons accepter aucune zone de non-droit», a-t-il dit alors que la France s'apprêtait à vivre sa onzième nuit d'émeutes. 34 policiers ont été blessés lors des affrontements avec les émeutiers dimanche soir. Parmi les 34 policiers blessés dimanche, deux ont été la cible de tirs de pistolets à grenaille et de fusils de chasse dans une cité de Grigny (banlieue sud de Paris). Le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy, qui s'est montré cette fois prudent en mesurant ses mots, a déploré que ces fonctionnaires aient été visés à la tête par les tireurs. À Saint-Etienne, une école maternelle a été incendiée dimanche en début de soirée, dans le quartier réputé difficile de Montreynaud. Outre de nouveaux incendies de voitures dans l'agglomération stéphanoise, les pompiers de la Loire ont lutté dimanche soir contre l'incendie de neuf poids-lourds sur le parking d'une entreprise de transport au Coteau, près de Roanne (Loire). Le quotidien français «Libération» a fait le bilan de la situation entre la France et la Côte d'Ivoire, un an après l'attaque de Bouaké et les violences qui ont suivi à Abidjan. « La France est empêtrée en Côte d'Ivoire », affirme le quotidien qui constate que désormais « il y a plus de soldats que de civils français» dans ce pays. Au lendemain de la onzième nuit de violences urbaines, les appels se sont multipliés au sein de la classe politique française, majoritairement à droite mais aussi à gauche, pour une intensification de la répression dans les quartiers sensibles. Le gouvernement français va-t-il recourir à l'article 16 de la Constitution française, relatif à l'état d'urgence, utilisé par De Gaulle ? Ou bien arrivera-t-il à trouver une issue moins musclée sachant que le temps est désormais compté ?