Les positions du parti d'Abbas El Fassi apparaissent souvent comme ambiguës, notamment dans le dossier de la réforme de la Moudawana. Le ministre istiqlalien, Saâd El Alami, s'explique. Le parti de l'Istiqlal est aujourd'hui sous les feux des projecteurs pour deux raisons. D'une part, au sujet de ses affinités politiques avec le PJD et d'autres part sur ses positions quant à la réforme de la Moudawana. En fait, ces deux aspects ont un dénominateur commun, les attentats du 16 mai. Bon nombre d'observateurs soutiennent que l'Istiqlal a choisi de garder ses distances avec les autres formations de gauche, sur le dossier de la réforme de la Moudawana. Certains pensent même que le parti d'Abbas El Fassi joue un double-jeu. "Cette accusation est dénuée de tout fondement", assure Saâd El Alami, ministre istiqlalien des Relations avec le Parlement et membre du comité exécutif du parti. Pour lui, aucune formation n'a fait preuve d'autant de clarté que l'Istiqlal dans cette affaire. "Nous faisons preuve de modération et le juste milieu a toujours été notre position", fustige le ministre. En effet, les Istiqlaliens demeurent fermement attachés au respect de "l'esprit de la Chari'a". Pour cela, El Alami rappelle la nécessité d'ouvrir la porte de l'Ijtihad. C'est, selon lui, le seul moyen de sortir de l'impasse actuelle. Et pour cause, au sein de la Commission Consultative Royale chargée de la révision de la Moudawana, dont le président n'est autre que l'ancien leader de l'Istiqlal, M'hamed Boucetta. Deux courants idéologiques s'affrontent. "Le premier regroupe ceux qui souhaitent appliquer la Chari'a à la lettre et le deuxième est composé de ceux qui mettent en avant des réalités en totale opposition avec nos valeurs", souligne El Alami. L'une des principales pommes de discorde est sans doute l'institution du wali. La présence de ce dernier est obligatoire pour la conclusion d'un acte de mariage. Plusieurs associations crient au scandale. Elles pensent que l'institution du wali (père, frère, oncle…) est de nature à conserver la domination masculine sur les femmes. En revanche, les istiqlaliens présentent le wali comme une "protection pour la femme et non un instrument d'oppression". Face à ces tensions, l'istiqlal a donc opté pour une neutralité. Cette position apparaît beaucoup plus comme une stratégie politique. En évitant de rentrer dans des conflits ouverts avec les autres formations, l'Istiqlal espère-t-il récolter les fruits de la réforme de la Moudawana, quels que soient les résultats? C'est le cas également pour ses affinités avec le PJD. L'Istiqlal est le seul parti qui a observé le silence sur son éventuelle dissolution. Certains de ses membres ont même condamné "l'acharnement" contre le PJD. A ce sujet, il ne faut pas oublier que l'Istiqlal a toujours été un parti nationaliste, certes, mais qui place l'islam au cœur de son action. Le fondateur du parti, Allal El Fassi, était également un personnage dont la culture est ancrée dans l'islam. En somme, la religion et la politique ont toujours fait bon ménage dans la maison istiqlalienne. Cette neutralité, quasiment passive, risque de créer des différends entre l'Istiqlal et les autres partis de gauche. En tout cas, El Alami semble confiant. Il pense que "les Marocains sont capables de se remettre en cause et faire preuve de sagesse afin de traverser cette période critique sans conséquences néfastes". Pour le ministre, au lendemain des attentats du 16 mai, certains ont commencé à faire preuve d'un "extrémisme dangereux", aussi grave que celui qui a enfanté le terrorisme.