«Celui qui demande que le Président irakien soit chassé et que l'Irak soit placé sous mandat des Nations Unies et de la Ligue arabe est un agent américain avec le visage d'un arabe et le cœur du diable.» Chaude, l'ambiance à Charm-El-Cheikh. Une ville balnéaire coincée entre la mer et le désert aux températures qui incitent à la joie de vivre, au bronzage et au farniente. Mais le problème avec les Arabes, c'est qu'ils ne savent pas voyager. Ce week-end, il paraît qu'un Libyen, un peu surchauffé a agressé un saoudien qui ne s'en est pas laissé compter. Non, ce n'était pas pour une fille. Mais il a presque fallu faire appel à la brigade touristique pour calmer les protagonistes. Le soleil, la mer, la plage de sable fin, une eau cristalline et des poissons multicolores, c'est cela en général Charm-El-Cheikh, mais quand la grande famille arabe se réunit le climat s'alourdit passablement. Le temps devient orageux. Et les noms d'oiseaux fusent. «Le Royaume d'Arabie saoudite n'est pas un agent de l'impérialisme comme d'autres le sont.» «Toi, qui t'a amené au pouvoir? Tu es un menteur et le tombeau t'attend.» On ne connaissait pas le prince héritier saoudien Abdellah Ben Abdelaziz sous cet angle coléreux, mais il faut dire que le colonel Mouammar Kadhafi qui a reçu cette volée de bois vert l'a un peu provoqué. Ses insinuations sur l'Arabie saoudite prête à s'allier au diable et sur la présence des Américains sur son sol n'étaient pas du tout consensuelles. «Ne parlez pas et n'intervenez pas sur de sujets sur lesquels vous n'avez aucune prise…» a tonné le prince hors de lui avant de quitter la salle. Sous le regard goguenard de Kadhafi, les présidents égypien, Hosni Moubarak, syrien, Bachar El-Assad, et libanais, Emile Lahoud ont alors suivi le prince pour le faire réunir. Les actes du Sommet arabe de Charm-El-Cheikh ressemblent à une main courante d'un commissariat de quartier d'une petite ville côtière en été. C'est chaud partout, dans les têtes et dans les cœurs. Tout de suite la population de tripoli est descendue «spontanément» dans la rue pour dénoncer l'Arabie saoudite. Alors que la presse saoudienne a donné naturellement de l'ampleur à l'altercation de Charm-El-Cheikh en traitant Kadhafi de «paon menteur et traître», de «héros de comédie» et «catastrophe qui s'est abattue sur le peuple libyen». Allons plus loin dans l'indignation, le quotidien Al Ryadh a affirmé que «la mission de Kadhafi à ce sommet a révélé ses intentions véritables et le rôle secret qu'il joue en faveur des ennemis de la nation arabe.» À l'heure qu'il est, Kadhafi doit méditer sous sa tente sur son équipée égyptienne et le prince Abdallah a dû se calmer. Bush, quant à lui, continue à préparer sa guerre, Chirac à courir derrière la paix, Saddam à creuser son trou, Blair à se justifier en anglais et le reste est aussi joyeux. Les parlementaires Turcs ont étranglé leur gouvernement sauvant ainsi la mise et l'honneur à tous les PJD recensés à travers le vaste monde. La presse de Bagdad a, elle, reçu avec élégance la proposition émiratie qui demande à Saddam de partir subrepticement de son pays. Babel écrit à ce sujet : «Celui qui demande que le Président irakien soit chassé et que l'Irak soit placé sous mandat des Nations Unies et de la Ligue arabe est un agent américain avec le visage d'un arabe et le cœur du diable.» Belle charade n'est-ce pas ? Voilà la coupe est pleine. Mais malgré tout cela, les arabes restent de joyeux drilles bien sympathiques. Sans eux le monde serait bien triste. En ce moment, ils foutent une ambiance d'enfer. Qu'est-ce qu'on s'éclate et Bush n'a pas encore commencé.