Selon Mustapha Sbiâa, directeur financier de Sogécrédit et ex-inspecteur de banque, plusieurs critères entrent en jeu quant au déroulement d'un détournement. Entretien. Aujourd'hui Le Maroc : Comment réagit une banque en cas de détournement ? Mustapha Sbiâa : Il n'y a pas de règle générale. Chaque cas est étudié à part selon plusieurs critères tels que la fonction de l'intéressé, son pouvoir au sein de l'institution bancaire, le système d'information et la procédure à suivre. Il ne faut pas oublier que chaque fraudeur ne fait que chercher un vice de forme dans la procédure bancaire qu'il exploite par la suite. La banque pourrait se contenter d'une réparation du préjudice, c'est-à-dire le remboursement des sommes détournées, ou alors décider de porter l'affaire devant la justice. Mais ceci n'est pas automatique. C'est toujours l'enchaînement des circonstances qui détermine l'issue de l'affaire. Pourquoi ? Chaque affaire de détournement ternit l'image de marque des banques. Celles-ci dépensent des grosses sommes d'argent, qui peuvent aller de quinze à vingt millions de dirhams par an, en communication externe uniquement. La médiatisation d'une affaire de détournement pourrait anéantir les efforts de cette communication-là. Et tout établissement bancaire met beaucoup de temps pour se relever d'un coup pareil, particulièrement sur le plan moral et la réputation. Comment la banque arrive-t-elle à compenser ces sommes dépensées ? Il ne faut pas oublier que chaque somme détournée est préalablement assurée. La perte de la banque, dans ce cas-là, ne se ressent pas sur le plan matériel puisque l'argent est remboursé par les compagnies d'assurance. Mais l'on parle alors de subrogation dans le droit, c'est-à-dire que ces assurances deviennent légalement partie intégrée dans le problème et détiennent le pouvoir de porter plainte. Ceci nécessite bien-sûr la mise en place d'un dossier juridique. Une procédure qui peut prendre du temps. En plus, bien avant d'en arriver là, du côté de la banque, on rentre dans une sphère interminable d'investigation pour avoir la preuve formelle relative au délit en question. Que peuvent faire alors les banques pour pallier ces détournements ? Il faut remonter à l'origine du problème, revoir les procédures bancaires ou verrouiller les systèmes d'information. Là aussi, tout dépend de la nature du détournement et de ces caractéristiques. C'est très compliqué, car chaque cas, nécessite une procédure d'investigation particulière. Mais il faut dire qu'il est aussi question d'éducation et de perception du principe de la confiance et de l'honnêteté présumés dans un employé de banque. Je ne pense pas qu'il soit possible d'installer un détecteur de «tentations» dans chaque banque pour s'assurer qu'aucun détournement n'aura lieu. Je reviens pour insister sur la nécessité du renforcement des systèmes d'information et de la sécurité en général. De toute façon, ce problème n'existe pas que dans notre pays. Des cas de détournement, on en trouve partout dans le monde ; là où il ya de l'argent, la tentation n'est pas loin.