Malgré l'absence de liens jusqu'ici établis entre le réseau terroriste et les différents suspects arrêtés au Kenya, Tel-Aviv et Washington continuaient dimanche de pointer du doigt la nébuleuse Ben Laden et ses tentacules. Dès les premières heures qui avaient suivi le double attentat de Mombasa, dans le Sud du Kenya, différents responsables israéliens avaient mis en cause jeudi l'organisation d'Oussama Ben Laden. L'antécédent des attentats imputés à Al-Qaïda en 1998 contre les ambassades américaines du Kenya et de Tanzanie (224 morts), ainsi que les récentes menaces de «représailles» faites par le réseau à l'encontre des Etats-Unis et de leurs alliés, avaient suffi aux autorités israéliennes pour identifier le coupable. Seize personnes -dont les trois kamikazes- avaient alors été tuées et quelque 80 autres blessées dans la matinée lors de l'explosion d'un véhicule piégé devant l'hôtel Paradise de Mombasa. Même si le nombre de victimes israéliennes n'est pas le plus révélateur -trois contre dix Kenyans- il ne faisait nul doute dès le début de l'enquête que l'attaque avait ciblé des ressortissants de Tel-Aviv, clients habituels de l'établissement hôtelier. D'autant plus que quelques minutes plus tôt, un avion israélien avait essuyé des tirs de missile alors qu'il décollait de la même ville. L'«Armée de la Palestine», inconnue, avait peu après revendiqué les attentats dans un communiqué adressé à un organe de presse libanais. Rien n'est pourtant venu confirmer cette piste sur laquelle les enquêteurs continuaient dimanche de travailler. Le gouvernement du Kenya a d'ailleurs estimé ce même jour qu'il continuerait d'être exposé à de telles attaques tant que durerait le conflit israélo-palestinien. «Aujourd'hui, les Palestiniens ne peuvent combattre les Israéliens en Israël. Ils doivent se battre à l'extérieur», a déclaré un membre influent du gouvernement, Shariff Nassir. Samedi, les Américains semblaient de leur côté porter leurs soupçons sur une organisation islamiste somalienne, Al Itihad al Islamiya, un groupe terroriste soupçonné de liens avec Al-Qaïda. Mogadiscio, pointé du doigt par Washington depuis les attentats du 11 septembre 2001, a déjà préconisé le démantèlement des « groupes terroristes » dans l'ensemble de la région tout en minimisant la probabilité d'un lien entre Al Itihad et Mombasa. En Israël, le ministre israélien de la Défense, Shaul Mofaz, a quant à lui déclaré lors de la réunion dominicale du cabinet Sharon que «la possibilité d'une implication d'Al-Qaïda faisait l'objet de soupçons qui allaient croissants, bien qu'il n'y ait pas de preuves concrètes». L'Etat hébreu a dépêché des enquêteurs sur place, notamment les services du Mossad. Le Kenya, lui, n'avait dimanche toujours pas établi de liens entre l'enquête menée sur place et la nébuleuse terroriste. La police locale a seulement précisé que l'un des deux fragments de bonbonne de gaz trouvés dans les décombres de l'hôtel présentait quatre chiffres «qui pourraient permettre d'en déterminer l'origine». Elle a arrêté depuis jeudi six Pakistanais et quatre Somaliens, toujours interrogés dimanche, tandis qu'un couple américano-espagnol a été relâché la veille. Face à ces nouvelles violences et la confusion qui les entoure, les Etats-Unis ont enfin averti dimanche leurs ressortissants d'un risque sérieux de nouvelle attaque en Afrique orientale, et leur ont recommandé d'éviter Djibouti, la Somalie, l'Ethiopie, l'Erythrée et le Yémen. L'Etat hébreu en a fait de même pour le Kenya, l'Afrique du Sud, l'Ethiopie, l'Erythrée et l'Egypte. La psychose est désormais aussi de mise dans cette région du monde, après l'Amérique, l'Asie et l'Europe...