Mustapha, qui ne cotise pas dans le foyer familial, demande 2,50dh à sa mère. Elle devient hors d'elle. Son père, son frère, ses deux sœurs, sa tante interviennent et une bagarre éclate pour finir par la mort de Mustapha. Il est 6h 10 m du dimanche 3 novembre. Un cri strident brise le silence qui règne au quartier Diour L'Khéraya, à Mohammédia. Les habitants se réveillent. «Que se passe-t-il, qui demande secours ?», s'interrogent-ils. Ils arrivent à savoir. La mère, qui demande du secours à son enfant, Mustapha, qui a perdu conscience. Quelqu'un téléphone à la protection civile. Les agents arrivent. Les ambulanciers rentrent au salon pour soulever le malade. L'un des ambulanciers remarque des traces de violence et des ecchymoses sur le corps de Mustapha. Mustapha est un jeune de trente et un ans. Il était un peintre en bâtiment. Il ne s'enivre pas, ne se drogue pas. Et pourtant,il est plus ou moins cruel et méchant surtout avec ses parents, ses deux sœurs et son frère. Il n'a jamais pensé participer aux dépenses de sa famille. Et le voilà, étendu, au salon, corps sans âme. «C'est interdit que nous transportons un mort, il faut appeler la police parce qu'il présente des traces de violence», affirme l'ambulancier. La police judiciaire a été alertée aussitôt et une brigade judiciaire s'est dépêchée sur les lieux et fait la même remarque que l'ambulancier. Leur chef s'adresse à la mère : «Que s'est-il passé ?» La mère fond en larmes et balbutie : « Il est rentré vers minuit dans un état lamentable pour dormir au salon… ». Le limier examine le cadavre, avise le procureur du Roi près le tribunal de première instance de Mohammédia avant de donner l'ordre de l'évacuer vers l'hôpital médico-légal. La sixième intuition du chef de la brigade lui met la puce à l'oreille. Il n'a pu croire la mère. Il entre dans une première chambre, lance des regards dans les quatre coins. Ses adjoints ne savent pas ce qu'il recherche. Ils se contentent de le suivre. « Tiens chef, voilà une chaussure maculée de sang… », lance l'un des enquêteurs à son chef. L'enquêteur la saisit et avance quelques pas pour trouver une étoffe de tissu, tachée également de sang. Aussitôt, il s'adresse à la mère pour l'interroger à haute voix : « Qui l'a tué, tu diras la vérité ou bien je vais mettre toute la famille à la prison ». Perplexe, la mère avoue : « Mustapha ne me verse jamais de l'argent…Hier, samedi, il m'a demandé 2,50 Dh bien qu'il vient de toucher son salaire hebdomadaire de 120 dirhams… ». Elle refuse. Il le lui reproche. Elle l'insulte. Mustapha n'a pas baissé la tête pour sortir comme s'il n'a rien entendu. Au contraire, il commence, sans vergogne, à échanger avec elle les invectives. La scène n'a pas plu à son père. Il saisit un bâton en bois pour asséner des coups à Mustapha. Ce dernier ne baisse pas ses mains, il résiste, échange avec eux les coups. Hors de lui, son frère, qui vient de rentrer saisit une brique et lui assène un coup à la tête. Mustapha, qui crie, tente de sauter par une fenêtre. Mais ses deux sœurs et sa tante l'empêchent en le tirant par ses vêtements. La mère, le père et le frère les rejoignent, lui ligotent les mains et les pieds avec une corde avant de commencer à le malmener à coups de poing, de pieds, de bâton et d'un tuyau en plastique. Vers minuit, Mustapha perd conscience. Il a été évacué vers la terrasse pour être mis dans un coin à la belle étoile. Ses parents, son frère, ses sœurs et sa tante retournent à leurs lits. Dorment-ils ? Personne ne sait exactement. Mais ce qui était sûr est que les yeux de la mère de Mustapha sont restés ouverts toute la nuit. L'aube arrive, elle descend du lit et monte à la terrasse pour se rassurer de son enfant. Mais c'est trop tard, il a déjà rendu l'âme. La mère, le père, le frère, la tante et les deux sœurs ont été mis entre les mains de la Chambre criminelle près la cour d'appel de Casablanca.