Abdellah était seul à la maison, en train de boire. Une voisine, amie de la famille, est venue demander des nouvelles de sa sœur. Le jeune homme lui a dit que tout le monde était à l'intérieur, avant de l'enfermer et de la violer. Chambre criminelle près la Cour d'Appel de Casablanca. Abdellah était, en ce jour du mois d'avril, au banc des accusés. Comme d'autres mis en cause qui attendaient d'être appelés à la barre par le président de la cour, il tournait de temps en temps la tête vers l'assistance. Il s'est même levé de sa place avant que le président de la cour ne lui ordonne de se rasseoir. Il semble ne pas s'être aperçu de la présence de sa mère qui était là, assise, depuis l'ouverture de l'audience. C'est la seule personne à être venue le soutenir. Ses six frères et sœurs se sont abstenus d'assister à son procès. Ils lui ont tourné le dos. La raison ? Son crime a jeté sur eux la honte dans le quartier, à Hay Mohammadi. Ils n'auraient jamais pensé être un jour aussi déshonorés. Ses deux sœurs n'ont pas pu concevoir comment leur frère est arrivé à violer leur amie, qui leur rendait souvent visite. Comment pourront-elles affronter son regard à l'avenir ? Comment pourront-elles lui demander de lui pardonner ? Leur mère qui a veillé sur elles depuis le décès de leur père s'est adressée à elles à maintes reprises pour les supplier d'implorer leur amie de retirer sa plainte. Mais en vain. Elles n'osaient même plus lui adresser la parole après ce qui était arrivé. Elle était encore sous le choc. Elle n'aurait jamais pu penser qu'elle allait être la proie d'une personne qu'elle considérait comme son propre frère. «Abdellah !», appelle le président de la cour. Un jeune, la trentaine, portant un tricot bleu, un blouson gris et un pantalon noir, s'est avancé vers le box des accusés. La tête baissée, il écoutait le président de la cour rappelant son identité. «Tu es accusé selon les dispositions de l'article 486 du code pénal pour viol », lui affirme le président de la cour qui feuilletait le dossier. Abdellah a gardé le silence pendant quelques secondes avant que le président ne lui demande de répondre s'il avait effectivement perpétré ce crime. Sans tarder cette fois-ci, il a avoué son crime. Il est allé plus loin en donnant les détails, tout en affirmant regretter à chaque fois son acte. «J'étais seul à la maison… Ma mère et mes sœurs n'étaient pas là…la première et l'une des secondes étaient chez ma tante depuis l'après-midi et l'autre sœur était à son travail… », a-t-il dit. Abdellah a profité de l'absence de sa mère et ses deux sœurs, encore célibataires contrairement à ses frères, pour commencer à boire chez lui. Il s'est habitué à acheter de temps en temps une bouteille de vin rouge pour s'enivrer sans prêter attention à sa famille. Il écoutait des chansons populaires, quand il a entendu des coups à la porte. Après avoir dissimulé la bouteille de vin, il s'est levé de sa place pour aller ouvrir. Il était 15h30. Il s'est retrouvé face à Majda, une amie de ses deux sœurs qui vient souvent passer quelque moment avec sa sœur au chômage. Cette jeune fille de vingt-trois ans, habitait à une centaine de mètresde chez eux. «Abdellah, ça va ? Il y a quelqu'un à l'intérieur ?», lui a-t-elle demandé, le sourire aux lèvres. Abdellah a écarquillé les yeux avant de lui affirmer que sa sœur était à l'intérieur. «Entre chez elle», lui a-t-il demandé? Majda est entrée sans attendre. Elle connaissait tous les coins de la maison. Seulement, en franchissant le seuil de la chambre où se trouvaient d'habitude son amie et sa mère, elle a vu qu'il n'y avait personne. Elle s'est tournée vers Abdellah pour lui demander où elles étaient. «Tu n'as pas besoin de moi ?», lui a-t-il demandé sans vergogne tout en se déboutonnant. Troublée, elle a tenté de sortir. Mais en vain. Abdellah la tenait déjà par l'épaule et l'a tirée vers lui pour commencer à l'embrasser. Elle a voulu crier. C'est alors qu'il l'a menacée avec un couteau. Que faire ? Continuer à lui résister ? Crier au secours ? Et le couteau qu'il tenait à la main ? Pouvait-il vraiment passer à l'acte ? Qui sait ? Après quelques tournées de vin rouge, il avait déjà commencé à perdre la tête. Et enfin, elle lui a obtempéré. Elle l'a laissé lui ôter ses vêtements pour abuser d'elle. Ensuite il lui a enfin ouvert la porte. Aussitôt qu'elle est rentrée chez elle, sa mère l'a conduite au commissariat de police. Une plainte a été déposée et Abdellah a été arrêté alors qu'il était encore en train de se soûler. «Oui, M. le président, j'ai abusé d'elle, mais je le regrette». C'est ainsi que le violeur a achevé sa déclaration devant les juges. Un regret qui ne mettra pas fin au traumatisme subi par Majda bien qu'elle ait appris qu'Abdellah a été condamné à 5 ans de réclusion criminelle.