La Syrie refuse de libérer des soldats et officiers algériens ainsi que des éléments du Polisario : une preuve accablante contre l'Algérie et le Polisario pour leur implication dans le massacre du peuple syrien    IA : Le Maroc, connecté aux activités onusiennes    El Guerguerat : Mise en échec d'une tentative de trafic international de drogues    Ligue des champions: Le PSG quasiment en huitième après sa victoire à Brest en barrage aller    Préparatifs du Mondial 2030 : Laftit à Madrid    Secteur agricole : les promesses sociales seront-elles tenues ?    Les fonds palestiniens débloqués après intervention du Roi Mohammed VI    Lancement du renouvellement des déclarations du patrimoine pour les fonctionnaires et agents de l'Etat, des collectivités territoriales, entreprises publiques et organismes sous tutelle    ESG : lancement d'une nouvelle norme internationale    Info en images. Signature de 4 conventions pour le développement de l'artisanat à Essaouira    Hajj 2025 : l'Arabie saoudite édicte de nouvelles règles drastiques, le Maroc concerné    Coface anticipe une croissance mondiale freinée par les risques systémiques en 2025    Maroc-Royaume-Uni: un partenariat solide aux perspectives prometteuses    Electricité éolienne : Saint-Gobain Maroc signe avec Nareva    Entretiens maroco-émiratis sur le renforcement de la coopération dans le domaine de l'aviation civile    La Chambre des représentants clôture la première session de l'année législative 2024-2025    Séisme de magnitude 5,2 dans la province de Ouezzane, pas de dégâts constatés    L'UE prendra des contre-mesures "fermes et proportionnées" aux taxes américaines    Moroccan earthquake shakes parts of Spain and Portugal    Le président syrien Ahmed Al-Charaa refuse une demande algérienne de libérer des mercenaires de l'ANP et du Polisario et indique qu'ils seront jugés    Corruption : le Maroc perd 26 places en 6 ans, selon Transparency Maroc    La Marine Royale sauve 41 migrants irréguliers au large des côtes de Tan-Tan    Le Maroc se prépare pour la Coupe du Monde avec une nouvelle loi visant à renforcer la sécurité dans les stades    L'attaquant Maroan Sannadi rêve de porter les couleurs du Maroc    Barrages LDC: City - Real la grande affiche de la soirée ! Brest-PSG en lever de rideau    CAN U20 Côte d'Ivoire 25 / Tirage (phase de poules) : Le Maroc dans le 3e pot    PSG : Luis Enrique confirme la disponibilité de Hakimi pour affronter Brest en Ligue des Champions    Affaires religieuses : Rabat et Berlin signent une déclaration d'intention conjointe    Températures prévues pour le mercredi 12 février 2025    Les prévisions du mardi 11 février    Protection des animaux : La polémique de Chaouen signe-t-elle le début du durcissement ? [INTEGRAL]    Marrakech : Session ordinaire du CA du Centre Hospitalier Universtaire Mohammed VI    Interview avec Sanae Akroud : « Mon film "Les Testaments" s'érige en hommage à la condition féminine »    La ministre de la Culture française visite les villes du Sahara marocain pour renforcer la coopération culturelle entre le Maroc et la France    Casablanca: «L'Effet Miroir» débarque au Studio des Arts Vivants    La Fondation Attijariwafa bank lance son 2è concours #ImagineTaVille    Rabat accueille une première rencontre internationale de musique maroco-andalouse    Séisme - Nasser Jebbour : «Pas de répliques à craindre»    Abidjan. Un Sommet sur les investissements dans les systèmes de santé    Caftan Week 2025 : L'âme du Sahara marocain capturée par le Caftan    Lomé vibre au rythme du festival « Les Afropéennes »    Comédiablanca célèbre l'humour dans toute sa diversité    Tan-Tan : la marine marocaine porte assistance à 41 Subsahariens candidats à l'émigration irrégulière    Un séisme de magnitude 5,2 secoue le nord du Maroc    L'Algérie réagit au projet de deuxième passage routier entre le Maroc et la Mauritanie    Kabylie : Le MAK demande à Marco Rubio de faire pression sur l'Algérie    Une médiation du roi Mohammed VI en faveur des Palestiniens    Cinéma : Christopher Nolan construit une ville au Maroc pour son film «The Odyssey»    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Années de plomb : Le silence prend la parole
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 24 - 12 - 2004

Quel bilan faire de cette première vague de témoignages ? La charge émotionnelle était au rendez-vous. Les interventions des uns et des autres ont plongé le public des téléspectateurs et des auditeurs dans un Maroc où le tout-répressif était la règle.
Les années de plomb sont en train, lentement mais surement, de se dissoudre dans l'alchimie de la parole. Après deux séances successives à Rabat, les auditions publiques des victimes de cette période noire, retransmises en direct sur les ondes de la radio télévision, marquent une pause pour reprendre dans une autre ville au début de l'année prochaine. Les choses se sont déroulées comme prévu. Dans l'ordre et la discipline. Pas de dérapage. Ni applaudissements, ni incident. Un silence religieux régnait dans la salle tout au long des auditions. Les témoins, dignes jusque dans leur manière de rompre le silence, ont également respecté jusqu'ici la consigne de l'Instance Équité et Réconciliation (IER), celle de ne pas donner des noms d'éventuels responsables des exactions, sous peine de tomber dans la diffamation.
Les Marocains ont été mis, deux jours durant, face à leur Histoire par les témoins qui se sont succédé au centre d'accueil du ministère de l'Équipement à Rabat : Ahmed Benmansour, 64 ans, résistant à l'occupation, qui subira les foudres du régime du Maroc indépendant des années 60 et 70 pour sa militance au sein de l'UNFP. Le témoignage de Rachid Manouzi, en son nom propre et au nom de sa famille, a rapproché les Marocains du calvaire de cette dernière et dont un des enfants, Houcine, est toujours porté disparu. Chari El Hou, personnage haut en couleurs, professeur à la retraite de son état, a connu la plupart des centres de détention secrets : Corbesse à Casablanca, celui de Tagounite au Sud de Zagora et enfin la prison d'Agdz. Il s'est exprimé dans un français clair car il n'a pas eu le temps d'apprendre l'arabe, dit-il. Fils de l'un des meneurs de la révolte du Rif de 1958-1959 décédé en 1995, Jamal Ameziane a souffert lui et sa famille de ces événements . Détention, arbitraire et humiliations.
Dans un arabe classique châtié, il a raconté un pan douloureux de l'Histoire du pays. Originaire du Sahara, El Ghali Bara est tombé à son tour dans les griffes de la répression, lui, et l'ensemble de sa famille dont sa femme et ses enfants. Arrêté en 1976, il ne sera libéré qu'en 1991.
Comme si elle racontait une histoire à ses petits-enfants, Fatima Aït Tajer, une femme sexagénaire, a retenu l'attention du public par sa manière de dire par des mots simples sa douleur de mère à la recherche de son fils disparu : le jeune Hassan Semlali, membre du groupe Serfaty. Cette dame a narré avec spontanéité sa galère -et celle de nombreuses femmes dans son cas- dans les dédales d'une administration policière et judiciaire froide et impitoyable. “ Les policiers giflaient les jeunes filles“, dit-elle comme pour signifier l'ambiance du Maroc de cette époque-là. L'arbitraire total.
Le cycle des auditions publiques s'est poursuivi mercredi 22 décembre avec d'autres témoignages aussi poignants. Ahmed Harzenni, ex-militant marxiste, 12 ans de prison, a fait une “prestation“ remarquée. “ Je ne suis pas une victime des années de plomb, mais un militant qui voulait changer les choses par tous les moyens“, a-t-il déclaré en substance.
Contrairement aux autres témoins, il a expliqué les raisons de son emprisonnement, assumant son action jusqu'au bout. Ce qui n'était pas le cas par exemple de l'ex-sous-officier Abdallah Aagaou qui s'est contenté de dire “avoir exécuté des ordres militaires“, allusion faite à la tentative du coup d'État de 1972.
Le récit de M. Aagaou sur sa détention au bagne de Tazamamart avec ses compagnons d'infortune a jeté une lumière crue sur un lieu ténébreux où l'horreur avait atteint des sommets. La scène du prisonnier dont la chair a collé comme la glu à la dalle qui lui tenait de lit, fait froid dans le dos.
Quel bilan faire de cette première vague de témoignages ? La charge émotionnelle était au rendez-vous. Les interventions des uns et des autres ont plongé le public des téléspectateurs et des auditeurs dans un Maroc où le tout-répressif était la règle, leur permettant de se faire une idée sur cette période sombre de l'Histoire du pays. Chaque témoin a raconté à sa façon ce qu'il a subi dans les centres secrets de détention, entre interrogatoires musclées, bordées d'insultes et diverses techniques de torture. Les souvenirs douloureux refluent petit à petit, les mots jaillissent comme un geyser et les visages se ferment à la remémoration d'une scène horrible. Libérer la parole, dérouler le fil d'une mémoire endolorie. Un exercice pénible mais salutaire. Quel est le sentiment du moment de ces victimes ? Le soulagement certainement. Le soulagement de s'être délesté un peu, l'espace de vingt minutes, de souffrances qui pèsent des montagnes en les partageant avec leurs compatriotes. Du récit des rescapés des bagnes de la mort, on se rend compte que la répression qui s'est abattue aveuglément sur eux était le fait d'instruments impitoyables d'un système déterminé à écraser tous ceux qui lui résistaient.
Il n'est pas rare d'entendre des citoyens, scotchés devant leur téléviseur, exprimer à la fois leur étonnement et leur répulsion face aux méthodes utilisées dans les années de plomb. Ils étaient peut-être loin de soupçonner l'importance de la répression qui a broyé toute une génération de leurs compatriotes.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.