Chaque fois que le gouvernement espagnol entame une campagne hostile contre le Maroc et ses institutions, la majorité des médias nationaux sont perturbés par l'hésitation. La langue fait défaut. La politique hautement hostile de l'Espagne envers le Maroc n'est pas prête de finir de faire parler d'elle. Personne n'ignore que cette offensive médiatique, appuyée par des déclarations officielles et officieuses, résulte tout d'abord de la position marocaine d'arrêter l'hémorragie de ses richesses halieutiques. Elle est aussi la conséquence de ce comportement du Maroc qui se veut trop indépendant et qui compte traiter d'égal à égal avec un ex-colonisateur. Or, pour ce dernier, le Maroc continue d'être un marché qui doit consommer les produits ibériques et fournir ses poissons aux pêcheurs de notre voisin septentrional. Le fer de lance de cette campagne anti-marocaine, sont, bien entendu, les médias tous azimuts. Ils font très mal à notre pays. D'autant plus que les journalistes marocains hispanophones sont comptés sur les doigts, avec en moins parmi eux, ceux qui s'alignent et poursuivent le travail des médias ibériques sur le sol marocain. Une sorte de relais. Quant aux publications nationales classiques, elles se sentent dépassées par les évènements et marquent une nette hésitation à chaque fois que le Maroc fait l'objet d'une attaque ou que ses institutions soient vilipendées gratuitement. A part le quotidien arabophone « Al Alam», qui réagit instantanément à chaque attaque contre la nation, et quelques rarissimes organes de presse, les médias nationaux naviguent dans le vague. Faute de connaissance de la langue espagnole, toutes les attaques gratuites à l'encontre de la nation marocaine ou ses symboles de souveraineté passent inaperçus. Ce qui n'a jamais été le cas lorsqu'une telle situation eût eu lieu en langue arabe ou en français. Toujours est-il que la presse nationale, à force d'hésitation et de mélange de traitements, finit par adopter carrément les thèses espagnoles sur plusieurs volets. L'immigration clandestine, le trafic de drogue, la marchandise de contrebande, constituent les exemples les plus frappants dans ce sens. Ainsi, on fait du Maroc, sans le vouloir, le seul responsable de toutes les entraves à la bonne conduite de voisinage et du respect mutuel entre deux Etats souverains comme il est supposé d'être dans les relations internationales. Au Maroc, l'opinion fait corps derrière l'indignation officielle quand elle a lieu, alors qu'en Espagne, les commentaires des éditorialistes sont plus variés. Les médias conservateurs soutiennent sans réserve le gouvernement dans toute affaire qui «mettrait en cause sa respectabilité internationale». C'était là la motivation principale avancée par l'éditorialiste d'ABC lors de la crise autour de l'îlot marocain Leila/Tourah. Alors que derrière cette crise, se jouait en réalité le destin des possessions espagnoles de Ceuta et Melilla, sur la côte marocaine, que Madrid juge indispensables à sa maîtrise du détroit de Gibraltar, préoccupation qui inspire l'essentiel de sa politique extérieure, comme l'a bien écrit un journal étranger au moment de la crise «Le Temps International» (Genève, Suisse). Le Maroc, ajoute le journal suisse, a fait de leur retour sous sa souveraineté une réclamation incessante, depuis la fin du protectorat espagnol. Un traitement neutre mais qui épouse sans le vouloir la thèse officielle marocaine, qui est celle de la logique. La presse nationale ne manque pas à son devoir, mais se fait avoir en hésitant quand il s'agit de réactions suite à un différend, relatif à nos relations avec notre voisin du nord. Le résultat est que les thèses et les positions espagnoles sont fortement médiatisées à l'intérieur de notre pays grâce à seulement deux ou trois honorables correspondants.