Khaled se trouve derrière les barreaux pour une peine de 20 ans de réclusion criminelle. Il a tué le frère de l'enfant qui a refusé de lui donner un morceau de pain. «Dossier n° 1087/05/01…Khaled. G…», appelle le président de la chambre criminelle près la cour d'appel de Casablanca. Un jeune homme se lève des bancs des accusés et avance vers la barre. Son apparence manifeste tous les ingrédients de la misère ; il paraît tout efflanqué dans ses vêtements en haillons vert, bleu et jaune, chaussant des sandales en plastique noir. Le juge appelle ensuite les deux témoins : Khadija..R et le mineur, Abdelali. Il leur demande de quitter la salle et d'attendre qu'il les appelle. Se tournant vers Khaled, il l'interroge : «Ton nom, la date de ta naissance, l'adresse…» «Khaled. G, né en 1970 à Casablanca, célibataire, journalier, je demeure au quartier Al Walaa, à Casablanca……», balbutie-t-il. «Tu es accusé d'homicide volontaire selon les dispositions de l'article 392 du code pénal…Que dis-tu…», lui lance le juge. «De quoi ?…», demande-t-il. «Tu es accusé d'avoir poignardé mortellement Nabil. C…, âgé de treize ans…», lui rappelle le magistrat. «J'étais dans un état d'ivresse …J'au bu deux bouteilles de vin rouge…J'ai demandé un morceau de pain à Abdelilah qui en portait…Il marchait en direction de son domicile…je le connais…». Khaled se tait et pousse un soupir comme s'il se soulageait d'un calvaire qu'il éprouve depuis quelques semaines. «Continue…» lui demande une fois encore le président de la cour. Et comme s'il attendait cet ordre pour reprendre ses aveux : «…Abdelilah s'est moqué de moi…il m'a insulté…». «et qu'est-ce qu'il t'avait dit au juste? lui demande le juge. «je ne me souviens pas. J'étais en état d'ivresse…Quand il m'a insulté, je n'ai pas pu contenir mes nerfs…je l'ai giflé et je l'ai roué de coups…Il a commencé à pleurer et il s'est rendu chez lui…Quelques minutes plus tard, c'est son frère Nabil qui arrive…Il a commencé à m'injurier…Il n'était pas seul, il était accompagné par d'autres enfants…Ils ont commencé à me frapper et à m'asséner des coups de poing…Ils m'ont provoqué…Je ne sais pas comment j'ai pris le couteau qui était dans ma poche…Je l'utilisais pour couper les morceaux (T'roufa) du haschisch…». «Tu consommes seulement du haschisch ou d'autres drogues ?», lui demande le président. «Je consomme aussi la colle de dissolution …», avoue-t-il avec une naïveté apparente. Le juge appelle Khanat, mère du défunt. Elle prête serment avant de répondre à la cour : «j'étais en train de prendre mon dîner quand j'ai demandé à mon fils, Abdelilah, d'aller acheter du pain…Seulement, il est revenu en pleurs…Et quand son frère rejoint Khaled pour lui demander des explications, ce dernier l'a poignardé …». «Il portait deux couteaux…», affirme le frère de la victime. Le juge a donné la parole au représentant du ministère public et à la défense . le premier a requis la peine maximale précisant que l'auteur avait l'intention de tuer le défunt et la deuxième a réclamé la requalification de l'accusation aux coups et blessures ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner. Et la cour a été pour la plaidoirie de la défense. Elle a reconnu que Khaled n'avait pas l'intention de tuer Nabil et l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle.