Maintenant que le Maroc a exprimé sa volonté de réintégrer l'Union Africaine (UA), la concrétisation de ce retour n'est plus qu'une question de formalités. Selon les observateurs, la suspension de la «Rasd» de cette organisation ne serait, elle aussi, qu'une question de temps. A l'heure où nous mettions sous presse, ils étaient 28 pays membres de l'UA à avoir présenté une motion en vue de la suspension de la «Rasd» des activités de l'Union et de tous ses organes. Idriss Déby Itno, président de la République du Tchad et président en exercice de l'UA, a reçu lundi une motion signée par la majorité des pays membres de l'UA. Ceux-ci ont décidé «d'agir en vue de la suspension prochaine de la «république arabe sahraouie démocratique» des activités de l'Union Africaine, et de tous ses organes, afin de permettre à l'UA de jouer un rôle constructif et de contribuer positivement aux efforts de l'ONU, pour un dénouement définitif au différend régional sur le Sahara», lit-on sur le texte de la motion. Réagissant à la question, le ministre délégué aux affaires étrangères, Nasser Bourita, explique à ALM qu'il s'agit là d'une réaction spontanée au discours royal adressé au sommet de l'UA, tenu les 17 et 18 juillet dans la capitale rwandaise, Kigali. «Il est important de retenir que cette réaction, rapide et spontanée, exprime un soutien qui émane des chefs d'Etat des pays qui couvrent la totalité des régions de l'Afrique», indique Bourita. En effet, à observer la cartographie du continent, il est clair que les 28 pays en question représentent toutes les régions, y compris celles jusque-là connues par leur hostilité à l'intégrité territoriale du Royaume, telle l'Afrique australe. La même source fait également remarquer dans ce sens l'évolution de la position de la Zambie, de la Libye ou encore du Ghana, un pays membre historique et influent de l'UA qui soutenait la pseudo Rasd et qui figure aujourd'hui parmi les signataires de la motion exigeant la suspension de l'adhésion de cette «entité fantoche» à l'UA. Pourquoi une motion ? Il est à préciser que l'acte constitutif de l'UA comprend un vide qui ne permet pas à ses membres de suspendre directement un autre membre. D'où l'intérêt d'une motion. Celle-ci permettra, à condition d'obtenir un vote de la majorité des deux tiers, de suspendre l'activité de la «Rasd» ainsi que son adhésion à l'UA. Confiant, le ministre délégué au ministère des affaires étrangères nous assure que «la suspension est prévue». Pour lui, il est important de garder à l'esprit que la liste des 28 pays est loin d'être représentative. «Il faut savoir que ce n'est pas une liste fermée, ni exhaustive. Il s'agit d'un bloc beaucoup plus large», avait-il précisé en mentionnant que si ces pays soutiennent aujourd'hui le Maroc, ils le font sur la base de plusieurs critères essentiels. A commencer par une prise de conscience du poids du Royaume en Afrique. Le Maroc est, en effet, le deuxième investisseur après l'Afrique du Sud, il est également un acteur important de développement et de maintien de la paix dans la région. Pour M. Bourita, ce dernier point est l'un des motifs qui font que le soutien à la cause du Maroc n'est pas près de prendre fin. «La valeur ajoutée que peut apporter le Maroc au sein de l'UA n'est pas à omettre. Le Royaume aidera l'Afrique à faire face à des défis importants dans lesquels notre pays a d'ores et déjà aiguisé son expérience. Il s'agit des questions liées aux enjeux climatiques ou encore migratoires mais également du rôle primordial que joue le Maroc dans la stabilité des pays comme la Côte d'Ivoire, la RDC et la RCA». Cette valeur ajoutée certaine mise à part, Nasser Bourita indique qu'il existe un flagrant décalage, qui reste non justifié, entre les positions prises au niveau national (2/3 des pays africains ne reconnaissent pas la «Rasd», ndlr) et celles des institutions. Que dit le droit international ? Quant à la question même de la suspension et son poids juridique, la même source explique à ALM qu'elle est en parfaite conformité avec le droit international. «Quand un pays subit un changement forcé, coup d'Etat ou autres, ce même pays est suspendu pour cause de violation d'ordre institutionnel. Qu'en est-il alors d'une supercherie légale flagrante ?», s'interroge-t-il. Ce point a d'ailleurs été largement appuyé par le président sénégalais Macky Sall qui a précisé dans une déclaration à la presse que cette motion demande que la «Rasd» «soit suspendue de l'UA en attendant que l'ONU règle le problème devant le Conseil de sécurité. C'est une demande qui est en rapport avec le droit international». Selon lui toujours, dès lors que la «Rasd n'a pas été reconnue par les Nations Unies et d'autres organisations internationales, il aurait été plus juste d'attendre qu'un référendum d'autodétermination ait lieu, par exemple, pour ensuite se prononcer au niveau continental». Quelle est la prochaine étape pour le Maroc ? Pour ce qui est de la réintégration du Maroc, M. Bourita précise que «tout pays africain peut demander d'adhérer à l'UA». Une fois la demande exprimée, le Maroc est appelé à acter politiquement cette intégration et envoyer une demande écrite aux membres de l'UA. La reprise du Royaume de son siège vacant depuis 32 ans se fera ensuite sur la base d'un vote de la majorité des pays membres.