Le gouvernement de José Maria Aznar a rendu publique une note du ministère de l'Economie qui classe le Maroc avec Israël et l'Irak en "pays à destination très sensible" en matière de ventes d'armement espagnol. Décidément, le gouvernement espagnol paraît être décidé à militariser, en faisant feu de tout bois, le conflit avec Maroc. C'est dans ce cadre qu'interviennent les dernières déclarations de certains responsables du gouvernement espagnol affirmant la décision de Madrid de geler toutes les exportations d'armement vers le Maroc. Ainsi, le ministère espagnol de l'Economie a diffusé, mardi, une note qui classe le Maroc avec l'Irak et Israël comme "des pays à destination très sensible" actuellement. Depuis une année, affirme la note, l'Espagne a gelé toutes les ventes d'armement au Maroc. Ce qui représente "un embargo de fait" sur toutes les exportations de matériel classé de défense. Une annonce confirmée par le secrétaire général du Commerce extérieur, Francisco Utrera, devant le Congrès espagnol (Chambre des députés espagnole) pour qui "la situation a changé depuis la crise de Perejil (îlot Tourah)". Rappelons que l'Espagne n'a pas cessé de protester, durant cette année, auprès des pays ayant conclu des marchés de vente d'armement avec le Maroc comme la France ou les Etats-Unis. Des sources informées rapportent que le gouvernement espagnol exerce actuellement des pressions sur la Biélorussie pour qu'elle cesse sa collaboration militaire avec le Maroc. Sachant que le Maroc avait été en 2001 le premier pays extra-communautaire en importation de l'armement espagnol avec un chiffre d'affaires de 28,3 millions d'euros, il est certain que c'est l'industrie militaire espagnole qui enregistre un manque à gagner avec la décision du gouvernement espagnol. D'ailleurs, le matériel de défense de fabrication espagnole importé par le Maroc est limité à des "véhicules de transport militaire non-blindés et non-armés" ce qui n'est pas d'un grand intérêt. Par ailleurs, la décision du Maroc d'annuler unilatéralement la rencontre entre les chefs de la diplomatie des deux pays à Madrid continue de susciter la polémique. Dans une déclaration à la télévision marocaine, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, Mohamed Benaïssa, a affirmé qu'il y a eu un total de 61 violations de la souveraineté territoriale marocaine par l'armée espagnole depuis la crise de l'îlot Tourah. "Nous disposons de preuves irréfutables de tous ces actes avec les précisions techniques nécessaires sur les incursions d'avions et de navires de guerre espagnols dans notre espace national aérien et maritime", a dit le ministre. Benaïssa a tenu aussi à manifester son étonnement de la référence faite par le gouvernement espagnol au transit des Marocains résidant à l'étranger sur le territoire espagnol. Le ministre faisait allusion à des propos tenus, à Copenhague, par le chef du gouvernement espagnol, José Maria Aznar. En mentionnant le transit des MRE par l'Espagne, ce dernier semblait utiliser ce passage annuel comme une carte de pression contre le Maroc. Les autorités militaires espagnoles ont affirmé avoir en leur possession des documents visuels qui prouvent que l'hélicoptère espagnol n'a pas atterri sur Tourah. Le chef d'état-major de l'armée espagnole, Alfonso Pardo de Santayana y Coloma, a déclaré que "le centre opérationnel du commandement d'artillerie de la côte" situé à Tarifa a enregistré sur vidéo la scène ayant provoqué le conflit. En ce qui concerne les efforts diplomatiques internationaux visant à apaiser la crise entre les deux pays voisins, deux nouvelles initiatives ont été enregistrées. Ainsi, les instances de l'Union Européenne paraissent être décidées à ne pas répéter la même erreur commise lors de la première crise de Tourah. Dans ce cadre, le haut représentant de l'UE pour les relations extérieures, Javier Solana, rencontrera le chef de la diplomatie marocaine, Mohamed Benaïssa, mardi prochain à Bruxelles. Le porte-parole de Solana, Cristina Gallach, a annoncé, hier dans la capitale européenne, que le haut responsable européen est disposé à aider à la normalisation des relations entre Rabat et Madrid. Elle a toutefois précisé que l'UE considère cette question comme un "problème bilatéral" entre le Maroc et l'Espagne qui doit être réglé par le dialogue. "L'UE souhaite une normalisation rapide des relations entre l'Espagne, pays membre, et le Maroc, qui demeure un partenaire important de l'union", a-t-elle rajouté. Par ailleurs, le ministre des Affaires étrangères français, Dominique de Villepin, a affirmé que son pays est disposé à jouer un rôle de médiation entre le Maroc et l'Espagne. Le ministre français a fait cette déclaration aux termes d'une rencontre qu'il a eue, hier, avec son homologue espagnole, Ana Palacio.