Si la presse manque d'habitude de sujets d'actualité pendant l'été, le mois d'août cette année a livré aux journaux de quoi tenir la cadence. Un lot de crimes crapuleux. Le traitement est porteur mais professionnellement limité. Nul doute que le radicalisme islamiste, le jihad salafi, laïcité, athéisme et un certain nombre de concepts ont trouvé leur place dans les journaux marocains comme jamais auparavant. Les crimes commis par les groupuscules barbus ont dominé les sommaires des journaux cet été. Le phénomène suscite une longue réflexion. Les médias nationaux sont passés à côté. Au lieu de cerner le problème et élargir le débat impliquant ainsi toutes les composantes de la société, l'on s'est retrouvé devant moult prises de positions, laissant ainsi l'opinion publique nationale sur sa faim. En somme, apparaissent trois formes de réaction dans ce sens. Des publications qui sortent carrément l'artillerie lourde et bombardent à vue, faisant des échéances électorales leur unique motivation. D'autres titres préfèrent une position de résignation qu'ils veulent faire passer pour de la neutralité, attendant que les choses se tassent, en dérivant parfois en une cour à peine masquée. Cette attitude est considérée par les observateurs comme une manœuvre électorale pour s'attirer la sympathie des islamistes «officiels» en vue d'une probable alliance aléatoire. Et enfin, la presse qui défend l'islamisme, criant à l'amalgame se donnant ainsi le mal d'expliquer point par point la réalité de l'islamisme et reniant les auteurs des actes criminels. Ce n'est pas en banalisant les actions criminelles que le problème serait résolu. Cette presse, appartenant aux partis à connotation islamiste qui visent la prochaine majorité, faisant octroyer, du reste, aux islamistes participant au processus de la transition démocratique un statut de victime. Or il aurait été plus judicieux de traiter le phénomène à sa juste nature, la responsabilité étant partagée. L'information, quand elle existe, demeure périphérique, marginale et incomplète. D'où le foisonnement d'un autre médium : la rumeur. Et c'est l'opinion publique qui en fait les frais. D'autant plus que le mutisme de la télévision, pourtant médias de masses, ne fait que renforcer l'opacité du phénomène. Le public large se réfère toujours à la télévision, c'est un fait. Seulement, nos deux boîtes à images donnent l'impression que ce qui ébranle la société n'est qu'un vulgaire fait divers qu'on relate de façon circoncise, comme si cela se passait dans un autre pays. Pourtant, certaines émissions apparues depuis quelque temps ( affaires parlementaires sur TVM et spécial élections 2002 sur 2M) auraient pu organiser des tables rondes en donnant la parole à différents acteurs comblant ainsi l'ignorance des uns et la curiosité des autres. En principe, l'on met à profit sa position sociale non pour fuir les responsabilités mais pour les revendiquer.