Entre surenchère belliqueuse et négation de tout projet d'attaque contre l'Irak, les Etats-Unis et leur allié britannique continuent de maintenir la pression sur Saddam Hussein. Les raids se multiplient sur le terrain. «Il n'y a aucun doute qu'il est en train d'essayer d'acquérir des armes de grande destruction, en particulier une capacité nucléaire». Ces propos relatifs au président irakien ont été tenus mardi par le Premier ministre britannique dans les colonnes du mensuel anglais Prospect. Tony Blair a également indiqué, concernant la préparation par les Américains d'un plan d'attaque pour renverser Saddam Hussein, que «si le temps de l'action arrivait, les preuves seraient présentées aux gens». La semaine dernière, le leader travailliste avait déjà averti que le programme irakien de développement d'armes de destruction massive constituait une «menace qui n'a pas diminué mais qui a au contraire augmenté». Durant la même période, Washington avait aussi ressorti la question d'une intervention militaire. Prenant le monde à témoin du refus irakien de voir les inspecteurs onusiens revenir, le secrétaire américain à la Défense, Donald Rumsfeld, avait indiqué le 18 juillet qu'une réévaluation des plans de guerre contre l'Irak était en cours. Et ce au moment où son adjoint Paul Wolfowitz était envoyé en Turquie pour discuter du même projet. Régulièrement la presse américaine spécule elle aussi, à coup de fuites provenant du Pentagone, sur la possibilité d'une attaque qu'elle voit en deux options: engagement minime, essentiellement aérien, ou massif, avec une forte mobilisation de soldats. Depuis les attentats du 11 septembre et la guerre que l'administration Bush a déclaré au terrorisme, la surenchère verbale a dnoc pour le moins été entretenue. Fin décembre, la conseillère du président, Condoleeza Rice, ne déclarait-elle pas elle aussi que le «monde et l'Irak vivraient mieux sans Saddam Hussein au pouvoir» ? Moins d'un mois plus tard, le chef de la Maison- Blanche renchérissait avec, dans son discours à la Nation, sa théorie de «l'axe du mal» comprenant l'Irak, l'Iran et la Corée du Nord, trois pays producteurs d'«armes de destruction massive» selon Washington. S'en sont suivis plusieurs rounds de négociations entre l'Irak et l'ONU sur la question du retour des inspecteurs chargés de contrôler le désarmement. Et la dernière réunion du 5 juillet s'est révélée un nouvel échec. Quelques jours plus tard, les avions américano-britanniques lançaient une série de raids sur «les installations de défense aérienne irakienne» dans le sud du pays, la zone d'exclusion. Selon l'agence de presse officielle INA, le bombardement de mardi dernier a tué un civil et blessé 22 autres. Quelques jours plus tôt, cinq autres personnes avaient été tuées et 17 autres blessées dans un raid similaire, selon Baghdad, dans la province de Qadissiya, au sud. Ces interventions démontrent que le président Bush ne cherche aujourd'hui plus à entretenir le mystère quant à ses intentions. Le ministre, irakien des Affaires étrangères Naji Sabri, avait beau répéter depuis Bruxelles lundi que son pays «ne cèderait pas au chantage et s'en tiendrait à ses principes, à savoir un règlement global du dossier par l'ONU ou rien », la menace est réelle. La date de l'opération ? Elle est, selon les diplomaties occidentale et arabe, soumise à plusieurs préalables. S'imposent notamment l'adhésion de tous les alliés, dont la plupart réclament une opération parrainée par l'ONU, et la consultation des pays arabes. Le président Bush devra aussi convaincre sa propre administration réticente à multiplier les fronts, vu les difficultés de sa campagne en Afghanistan et l'impasse de la résolution du conflit au Proche-Orient.