Ancien arbitre fédéral dans les années 70 et 80, souffrant d'une précarité matérielle grave, Mohamed Jamaï se trouve actuellement entre la vie et la mort. Un cas symptomatique de la situation des hommes en noir, en totale contradiction avec l'aspiration au professionnalisme du football marocain. Il a 62 ans et cela fait plus d'une dizaine d'années qu'il a quitté les terrains de football. Derrière lui retrouve une brillante carrière d'arbitre fédéral qui a officié un grand nombre de rencontres de la première et de la seconde divisions du championnat national. Tous les anciens joueurs, dirigeants et arbitres des trente dernières années le connaissent très bien. Mais de l'homme athlétique de jadis, il n'en reste qu'un corps affaibli par la maladie. Déjà opéré au cœur, l'ancien arbitre a été victime d'un accident vasculaire cérébral par ischémie artérielle (artère cérébrale bouchée) il y a une vingtaine de jours. Admis en urgence dans le service de réanimation d'une clinique de Rabat. Il y a séjourné pendant trois jours. De retour chez lui, l'homme, qui n'arrêtait pas de sillonner les terrains de football depuis tout petit, s'est retrouvé avec une paralysie qui l'empêchait de bouger. Son état s'est aggravé quelques jours plus tard à cause de complications urinaires. Hospitalisé cette fois-ci au service d'urologie de l'hôpital militaire Mohammed V de Rabat, Mohamed Jamaï s'y trouve toujours. «Si ce n'était l'intervention d'anciens joueurs de l'équipe des FAR, Bouchaïb Louizi pour ne citer que lui, mon père serait toujours chez lui, sans le moindre suivi médical», estime Khalid, fils aîné des cinq enfants de l'ancien arbitre. Et d'ajouter : «L'état de santé de mon père nécessite des soins particuliers et les frais d'hospitalisation dans des cliniques privées sont très chers». Des propos qui résument très bien la situation financière des arbitres au Maroc. Sans le sou à cause de l'absence d'une couverture médicale appropriée, l'ancien arbitre, à l'image de nombreux acteurs de la scène footballistique nationale, se retrouve dans la précarité. «C'est un très bon arbitre aux côtés duquel j'ai vécu de merveilleux moments sur les terrains de football, puisqu'on formait souvent le trio des arbitres que dans la vie de tous les jours», estime Abdelali Naciri, ancien arbitre international avec lequel Mohamed Jamaï a officié de nombreuses rencontres de 1975 à 1980. «Durant toute cette période, il était l'exemple de l'arbitre passionné du ballon rond, conscient de la mission qui lui revenait pour la promotion du ballon rond et déterminé à la mener à bien», ajoute M. Naciri, qui est également président de l'Amicale des arbitres marocains. Selon un autre arbitre, Hachmi Zougari Idrissi, président de l'association des arbitres de la ligue du Gharb, Mohamed Jamaï «n'a jamais hésité à mettre son expérience et son savoir-faire au profit de la jeune génération d'arbitres». «Personnellement, j'ai été en quelque sorte son élève au tout début de ma carrière d'arbitre. Durant toute une saison lors de laquelle je l'ai pratiquement côtoyé tous les week-ends, il n'a pas manqué une seule occasion pour éclairer ma lanterne». C'était dans les années 80. Depuis, l'homme a dû déposer son sifflet et enlever son habit noir sans pour autant quitter la scène sportive nationale. Fonctionnaire du ministère de la Jeunesse et des Sports, il a pris en charge la direction du siège des Fédérations, sis à Rabat, durant de nombreuses années. Tout au long de sa carrière, Mohamed Jamaï a participé à l'organisation des plus grands événements sportifs qui ont eu lieu au Royaume : Jeux Panarabes (1985) et Coupe d'Afrique des nations (1988) entre autres. Mais ce passionné du ballon rond a dû rendre son tablier à la fin en 1999, année où il a pris sa retraite. Depuis, son quotidien se partage entre médecins, cliniques et hôpitaux.