A quelques jours du démarrage officiel de la campagne pour les élections législatives en Algérie, les partis se mobilisent et brandissent la menace d'un retour de l'obscurantisme sans un sursaut démocratique de la population. «Bouteflika et la poupée islamiste», avec ce titre en une, Le Matin de dimanche se montre plus qu'évocateur de l'ambiance qui règne en Algérie. «Qu'aura à choisir l'électeur le 30 mai dans une élection qui semble destinée à consacrer la scission avec la Kabylie et l'installation des islamistes ?» s'interroge le quotidien algérien. Cette inquiétude palpable au niveau des médias algériens rejoint d'ailleurs celle des responsables politiques qui multiplient les déclarations et les appels à la mobilisation pour parer une montée en flèche des islamistes. Samedi, lors d'un meeting à Oran, Abdallah Djaballah, le leader du Mouvement pour le renouveau national (MRN), et Lahbib Adami, le secrétaire général du mouvement Nahda, ont quant à eux ouvertement annoncé qu'ils misaient sur des têtes de listes d'anciens du FIS (Front islamique du Salut) pour mener campagne. Ils les «exhibent» même «fièrement» rapporte Le Matin. Une situation qui n'arrange en rien la contestation croissante - à la fois au sein et en dehors même des mouvements- dont font l'objet les deux grandes formations politiques, le Rassemblement national démocratique (RND) et le Front de libération nationale (FLN). Un danger également amplifié par les dernière estimations concernant le taux d'abstention lors du prochain scrutin : 80 % ! Ces indicateurs promettent selon Le Matin «la propulsion au parlement d'une majorité islamiste où les militants de l'ex-FIS seront fortement représentés». S'il relève également cette menace, le quotidien Liberté se montre cependant moins alarmiste. Selon lui, le rapport que devra ces jours-ci rendre le ministre en charge de l'organisation des élections apportera «des surprises». «Plusieurs listes entachées d'irrégularités et comportant des anomalies» pourraient même être «rejetées» par les autorités. Liberté croit même savoir que «toutes les listes sur lesquelles figurent les noms des repentis, des éléments de l'ex-FIS (…) et tous ceux qui sont soupçonnés d'avoir aidé les terroristes ne sont pas acceptées». Ahmed Ouyahia, le secrétaire général du Rassemblement national démocratique (RND), a pour sa part assuré samedi, lors d'une conférence de presse, que la prochaine assemblée nationale sera «démocrate, moderne et républicaine» pour peu que 70 % des Algériens votent et que «les commerçants en politique» (les partisans du report ou de l'annulation du scrutin) réalisent que «toute autre transition mettra le pays dans une crise institutionnelle et constitutionnelle dont il sera difficile de s'en sortir après». La classe politique ne cache d'ailleurs pas ses craintes vis à vis de la contestation populaire et de la situation en Kabylie. Le mouvement citoyen des Aârouch continue toujours sa politique de rejet des élections et ses délégués arrêtés à Tizi-Ouzou ont même entamé ce dimanche une grève de la faim, après ceux de Béjaïa pour revendiquer un statut de «détenus politiques». Plusieurs marches dans les différentes wilayas de la Kabylie ont également été organisées ces derniers jours. Dans l'extrême sud algérien, quelque 2.000 jeunes ont saccagé et incendié samedi des édifices publics dans la région de Tamanrasset. Et les islamistes continuent, eux, de terrifier et de tuer : trois militaires et un policier ont été tués, 5 gardes communaux blessés, dans des attentats à Sétif et Alger entre vendredi et samedi.