Depuis son instauration progressive durant l'année universitaire 2003-2004, aucune étude fiable n'a permis d'évaluer le système LMD (Licence Bac+3, Master Bac+5, Doctorat Bac+8). Cinq cohortes du cycle Licence ont été diplômées (2006, 2007, 2008, 2009 et 2010 ) dans le cadre de ce système et la première cohorte du cycle Master a été diplômée en 2008. L'année universitaire 2008-2009 a constitué la dernière étape de la mise en place de l'architecture pédagogique LMD à travers la mise en œuvre de la réforme du cycle de Doctorat. Le Programme d'urgence 2009-2012 qui est venu accélérer le rythme des réalisations de la réforme de l'enseignement a permis d'augmenter les budgets des universités de 40%. Selon Abdesselam El Ouazzani, doyen de la Faculté des sciences de l'éducation, «le LMD est parvenu en quelques années seulement à reconfigurer particulièrement le champ d'action pédagogique des enseignants chercheurs interpellés pour penser et repenser activement leurs approches d'enseignement-apprentissage, à retravailler leurs projets de filières pour accréditation tout en s'ouvrant sur les secteurs porteurs de l'économie et ses potentialités». (voir encadré ci-dessous). Tous ces avantages restent à démontrer, c'est le temps qui permet de juger de l'efficacité d'une réforme de l'enseignement. Pour l'instant, c'est la comparaison entre l'ancien et nouveau système (LMD) qui prévaut. «L'ancien système, malgré quelques défauts, était préférable au nouveau. Il suffit de comparer le niveau des anciens diplômés avec celui des nouveaux», c'est l'avis de Naima Guennouni professeur qui exerce dans l'enseignement supérieur depuis plus de vingt ans. Selon elle, le fait d'avoir réduit la Licence à trois années est en soi une régression. «L'année universitaire est scindée en deux semestres (au fait il s'agit plus de trimestres, leur durée ne dépasse pas les trois mois). Aussi, une matière qui était enseignée pendant toute une année universitaire doit l'être en un seul semestre, d'autant plus qu'il y a plusieurs matières fondamentales qu'on ne peut assurer en un semestre», explique Mme Guenouni. Et d'ajouter : «On se retrouve ainsi avec des introductions aux matières , des résumés, et souvent on reste dans les généralités». Par ailleurs, la réforme prévoit un système de contrôle continu, «ce qui a toujours été une revendication des enseignants et des étudiants», estime ce professeur de droit précisant que pour qu'il puisse y avoir contrôle continu, il faut un certain nombre de conditions qui ne sont pas fournies. Pas très judicieux donc d'assurer ce contrôle dans des amphis de quelques centaines d'étudiants. Le système de contrôle continu nécessite de petits groupes, et plus de moyens humains. «Avec ce nouveau système, nous passons chaque année les mois de janvier et février pour le premier semestre, et juin et juillet pour le second à faire des examens et des rattrapages», confie Mme Guennouni. Pour ce qui est du Master, le problème est presque identique , «d'abord c'est un système qui est sélectif, tout le monde n'y a pas accès; en plus il se déroule en quatre semestre y compris la préparation d'un mémoire ou rapport à la fin du quatrième semestre», révèle Mme Guennouni. Dans l'ancien système, les étudiants avaient deux années de formation pleine, ensuite deux autres années pour faire un travail de recherches correct, ce qui leur permettait de mieux se préparer au doctorat. «Maintenant les étudiants rédigent à la hâte en trois mois de petits rapports sans trop approfondir leurs recherches», regrette notre professeur. D'après, le doyen de la Faculté des sciences de l'éducation de Rabat ce qui entrave la bonne mise en œuvre de la réforme de l'enseignement supérieur est, entre autres, «le manque de ressources humaines qualifiées et les pesanteurs de l'ancien système». Pour M. El Ouazzani, la solution réside dans la formation continue, très utile pour accompagner les changements culturels et faire adhérer à la dynamique de l'enseignement supérieur. Puisque ce dernier «a décidé de relever les défis de la «formation utile» , de la recherche axée sur des résultats tangibles et créatrice de valeur ajoutée et celui de la compétitivité nationale et internationale afin de contribuer à l'économie mondiale des savoirs et de la technologie numérique», conclut M. El Ouazzani.