Comptes non certifiés, dépenses non justifiées et fonds non restitués, c'est en gros ce que reproche la Cour des comptes aux partis politiques. En effet, la Cour des comptes vient de publier son rapport relatif à l'audit des comptes des partis politiques et la vérification de leurs dépenses au titre du soutien public concernant l'exercice 2012. Si une seule formation politique sur les 35 répertoriées et légalement constituées au Maroc n'a pas produit de comptes, en l'occurrence l'UNFP (Union nationale des forces populaires), 15 partis politiques seulement ont communiqué leurs comptes dans les délais légaux. En revanche, dix-neuf partis ont produit leurs comptes hors délais. Bien évidemment, la Cour des comptes épluche les comptes des partis parce que ces derniers reçoivent des aides annuelles provenant de l'argent public. En 2012, la loi de Finances avait prévu une enveloppe budgétaire de 50 millions de dirhams au titre de l'aide publique pour la contribution à la couverture des frais de gestion des partis politiques. Pourtant, les fonds qui ont bénéficié aux différentes formations dépassent ce montant. «Le montant de la contribution effectivement accordé aux partis politiques au titre de l'année a atteint 59,03 millions», précise le rapport. Les partis reçoivent également des aides pour l'organisation de leurs congrès nationaux. Etat mon amour Bien qu'aucune dotation n'ait été prévue sur ce plan par la loi de Finances de 2012, l'Etat a bel et bien financé au cours de cette même année des congrès des partis. «L'Etat a contribué au financement des congrès de trois partis. Il s'agit en l'occurrence du parti de l'Istiqlal, du parti du Rassemblement national des indépendants et enfin du parti de l'Union socialiste des forces populaires», note la même source. Ainsi, le montant global accordé par l'Etat au titre de la contribution à la couverture des frais de gestion et à la couverture des frais d'organisation des congrès nationaux ordinaires des partis a atteint 68,50 millions de dirhams pour l'année 2012. Ces chiffres confirment que les partis politiques dépendent largement encore des aides publiques. On serait même tenté de dire que sans les aides de l'Etat, de nombreux partis politiques n'existeraient pas. Pour preuve et toujours selon le rapport, le montant du soutien accordé par l'Etat aux partis représente un taux de 86,27% du total de leurs produits. Cela dit, il existe des disparités quant à la part du financement public dans le total des ressources des partis politiques. Cette part dépasse 90% au niveau de 21 partis, alors qu'elle avoisine un taux de 35% pour le parti du Front des forces démocratiques. Toujours selon le rapport, cinq partis ont bénéficié de plus de 86% du total du soutien public. Il s'agit en l'occurrence du Parti de la justice et du développement (33,64%), du parti du Rassemblement national des indépendants (17,65%), du Parti authenticité et modernité (16,52%), du parti de l'Union socialiste des forces populaires (11,76%) et enfin du parti de l'Istiqlal (6,53%). A noter que le rapport ne mentionne pas les répliques des partis politiques, notamment épinglés par la Cour des comptes, alors qu'il s'agit d'une démarche systématique adoptée par l'institution de Driss Jettou dans la publication de ses rapports annuels. Recommandations Dans son rapport, la Cour des comptes a formulé plusieurs recommandations, notamment pour les autorités gouvernementales chargées du contrôle. En gros, la Cour leur demande de veiller à ce que les partis politiques procèdent à la restitution des montants indus de la participation de l'Etat au financement des campagnes électorales antérieures en prenant toutes les mesures à l'encontre des partis n'ayant pas encore rempli cette obligation légale. La Cour a également préconisé d'arrêter la catégorie de dépenses susceptibles d'être financées dans le cadre de la contribution de l'Etat à la couverture des frais d'organisation des congrès nationaux ordinaires. Il a également été recommandé d'assurer des actions de formation en faveur des partis politiques, d'élaborer une application informatique commune à tous les partis pour une exploitation optimale dudit plan comptable et enfin d'établir un manuel de procédures comptables. Partis politiques La Cour des comptes a réservé des recommandations spéciales pour les partis politiques. Il leur a été demandé de produire l'ensemble des documents relatifs aux comptes annuels dans les délais prescrits par la loi organique. La Cour a également préconisé de veiller à la certification des comptes produits conformément aux dispositions légales et en conformité avec la norme 5700 du manuel des normes d'audit légal et contractuel, pour une meilleure transparence financière. Un autre recommandation conseille aux partis de tenir une comptabilité conformément au code général de la normalisation comptable en tenant compte des adaptations prévues par le plan comptable normalisé des partis politiques. Il est également question d'établir un état détaillé des sommes virées aux structures locales des partis, appuyé par des pièces justificatives, et l'inclure dans le compte annuel. La Cour a également demandé de veiller au paiement de toute dépense dont le montant est supérieur ou égal à 10.000 dirhams par chèque ou par virement bancaire.