ALM : Comment se porte le marché de la sécurité privée au Maroc ? Rachid El Mounacifi : Franchement, le marché de la sécurité privée au Maroc est en réanimation. Le secteur est en crise même avec l'entrée en vigueur de la loi n°27-06 relative aux activités de gardiennage et de transport de fonds. Actuellement, il y a 3.000 entreprises qui emploient près de 100.000 personnes opérant dans le secteur à travers tout le pays. Mais, malheureusement, il y a seulement une vingtaine de ces 3.000 entreprises qui sont à la hauteur et qui exercent le métier dans les règles de l'art. Et seulement une dizaine d'entreprises investissent dans la formation continue de leurs agents. Qu'est-ce qu'a apporté la loi n°27-06 relative aux activités de gardiennage et de transport de fonds au secteur ? Vous savez, cette loi est insuffisante. D'ailleurs, ce texte a été élaboré sans que l'on fasse appel à tous les professionnels du secteur pour donner leurs avis. C'est pour cela que le secteur sombre dans l'anarchie depuis des années. Des éléments essentiels ne sont pas prévus par cette loi. Je cite le cas des gérants de ces entreprises offrant des services de gardiennage et de transport de fonds. En aucun moment, on exige un diplôme pour le gérant qui, normalement, doit avoir le baccalauréat plus une formation en gestion d'entreprises et une expérience concluante dans le domaine. Sur le terrain, on trouve même des gérants analphabètes. Cela ouvre la porte à toutes les dérives. Et c'est ce qui explique que le secteur est en crise. Que proposez-vous pour faire sortir ce secteur de l'anarchie ? C'est simple, il faut revoir la loi n° 27-06 relative aux activités de gardiennage et de transport de fonds ou carrément établir une nouvelle loi en parfaite concertation avec les professionnels du secteur. On doit commencer par ne permettre l'accès qu'aux professionnels du métier. Vous savez, il y a plusieurs spécialités dans cette profession. On a le maître chien, le veilleur de nuit, l'agent arrière caisse, la garde rapprochée, le gardiennage de chantier, la vidéosurveillance… C'est un domaine très vaste. Mais, dans la réalité, on trouve des entreprises qui confondent la sécurité avec le ménage. Pour eux c'est pareil. Et il y a également le problème de la facturation. Certaines entreprises facturent au client l'agent à 5.000 dirhams, alors que ce dernier ne touche même pas le Smig. Il faut tout revoir dans le secteur. Il y a aussi la corruption qui mine cette profession. Il y a beaucoup de zones d'ombre dans les passations de marché.