Le secteur de la santé connaît énormément de problèmes et de dysfonctionnement. C'est en ces termes que le ministre de la santé, Lhoussaine Louardi, a qualifié la situation actuelle du secteur lors d'une table ronde sur «L'accès aux soins : un droit pour tous» qui s'est tenue, mercredi 13 février, à Casablanca. Les défis sont de taille. A commencer par le budget alloué au ministère par l'Etat qui n'est que de 5,3%. «C'est peu comparativement à nos voisins algériens dont la part du budget est de 7,9%», a déclaré le ministre. Des indicateurs de santé au rouge Les indicateurs restent alarmants au niveau de l'offre de soins. Le pays compte 1 lit pour 1.000 habitants et 1 centre de santé pour 10.000 habitants. S'agissant du personnel de santé, la situation n'est guère réjouissante : 1 médecin pour 12.000 habitants et 1 infirmier pour 1.000 habitants. Au niveau de l'utilisation des services de santé, le ministre a indiqué que le taux d'hospitalisation est de 4,7 et de 13% pour les Urgences. S'agissant des officines, le pays compte une pharmacie pour 5.000 habitants et la dépense annuelle en médicaments par habitant n'est que de 400 DH. Tous ces indicateurs montrent bel et bien que le secteur de la santé va mal. Une vision globale pour une meilleure gestion du secteur Pour le ministre, une vision globale pour gérer le secteur s'impose plus que jamais. Celle-ci passe tout d'abord par le renforcement et le repositionnement institutionnel du ministère de la santé. «Jusqu'a présent le ministère était amené à tout faire en plus de la prestation de soins. C'est un ministère qui construit les hôpitaux, qui s'occupe de l'eau, l'électricité, la menuiserie, la maintenance, l'accueil, le jardinage… Ceci ne peut plus continuer. Le département de la santé doit se polariser sur l'offre de soins. Il doit être le garant dans l'équité et la démocratisation des soins», a t-il affirmé. Le deuxième élément de cette vision globale du secteur est le partenariat public-privé. Pour le ministre, il est temps de mettre les compétences des deux secteurs en commun. Quant au troisième élément, il porte sur la gestion des ressources humaines qui s'articule autour de plusieurs mesures : la transparence dans la nomination des responsables, la mise en place du référentiel des emplois et des compétences (REC), le nouveau statut des infirmiers, la création d'un Ordre professionnel paramédical et le développement du système LMD (Licence master doctorat). Ramed : 2 millions de cartes délivrées Aujourd'hui l'élément urgent pour le ministère de la santé est la réussite du Ramed. Pour l'année 2013, l'Etat a injecté 3 milliards de dirhams pour le financement du Régime. Le budget pour les médicaments a été revu à la hausse. En 2013, une enveloppe de 2,2 milliards de DH a été allouée aux médicaments contre 1,6 milliard en 2012 et 675 millions DH en 2011. Une dotation supplémentaire de 150 millions DH a été attribuée aux CHU pour faire face aux besoins en dispositifs médicaux onéreux. Dressant le bilan de ce Régime, M. Louardi a précisé que jusqu'à présent 2 millions de cartes ont été délivrées et 2,5 millions de personnes ont déposé leurs dossiers et disposent d'un récépissé. A noter qu'entre 8 et 10% des dossiers sont rejettés. Pour le ministre, le succès du Ramed passe par la disponibilité du personnel. Autrement dit, les professionnels de santé du public doivent rester dans le public et ceux du secteur libéral sont invités à travailler dans les hôpitaux publics. Sept priorités pour Louardi Cette rencontre a été l'occasion pour le ministre de présenter les sept priorités de son plan d'action. La priorité des priorités est la réorganisation et le renforcement des Urgences médicales hospitalières et pré-hospitalières à travers la création de 80 unités d'Urgences de proximité (30 en 2012) et 15 services mobiles d'Urgences et de réanimation SMUR (6 en 2012). Le département de la santé prévoit également la création de 2 nouveaux CHU à Oujda et Marrakech pour les brûlés et un trauma-center à Marrakech. La seconde priorité du ministère est la santé mentale. «La situation des hôpitaux psychiatriques est catastrophique car la santé mentale n'a jamais été une priorité des précédents ministères», a déploré M. Louardi. Le ministère s'est engagé à renforcer l'offre de soins psychiatriques avec la création de 3 hôpitaux régionaux (Kénitra, Agadir et El Kelâa) et 3 services intégrés de psychiatrie (El Jadida, Khouribga, Khenifra). Côté médicaments, 52 millions de dirhams ont été débloqués en 2012 pour les psychotropes de 3ème génération contre 30 millions DH auparavant. La politique de santé mentale de Louardi cible la prise en charge gratuite de plus de 70.000 schizophrènes et plus de 3.000 malades dépressifs. Sur le plan des infrastructures, 5 nouveaux centres d'addictologie verront le jour (Oujda, Tétouan , Agadir, KénitraetTanger). La politique pharmaceutique nationale figure en troisième position parmi les priorités. A ce sujet, le ministre a tenu à rappeler que 320 médicaments ont vu leurs prix baisser tout en faisant remarquer que le chiffre d'affaires de ces médicaments se chiffre à 827 millions de dirhams. Le département de la santé travaille actuellement sur la deuxième phase qui porte sur la révision des procédures de fixation des prix des médicaments avec la publication prochainement d'un nouveau décret. La seconde étape portera sur la réduction des prix de 1.000 à 1.500 médicaments, selon le ministre. La quatrième priorité porte sur les objectifs 4 et 5 des OMD, à savoir la réduction de la mortalité infanto-juvénile à 25 pour 1.000 naissances vivantes et la mortalité maternelle à 83 pour 100.000 naissances vivantes. Quant à la cinquième priorité, celle-ci porte sur l'organisation de l'offre hospitalière. Pour cela, il est prévu la création de deux hôpitaux mobiles et de deux nouveaux CHU (Agadir et Tanger). Le renforcement du dialogue social et l'organisation d'un colloque national sur la santé pour l'élaboration d'une charte nationale figurent parmi les autres priorités de Louardi.