La créativité féminine en matière théâtrale au Maroc a constitué l'axe central d'un séminaire organisé, mercredi à Rabat, dans une tentative d'approcher la création de la femme dans ce domaine -”le père des arts”- sur les plans de la mise en scène, la production, le scénario et la réalisation. Cette rencontre de deux jours, organisée à l'Institut supérieur d'art dramatique et d'animation culturelle (ISADAC), est initiée avec le soutien du ministère de la Culture, à travers les interventions de nombreux participants. Elle s'assigne pour objectifs de suivre les expériences menées par la femme sur les plans créatif et critique et qui traduisent sa prise de conscience culturelle, intellectuelle et sociale de la conjoncture politique, économique et sociale, reflétant par la même-occasion sa conception des disparités sociales soumise à la notion du développement, indique-t-on auprès des organisateurs. Quelques interventions se sont penchées sur les recherches et études ayant trait à la production féminine dans les domaines artistiques de façon générale et celui du théâtre de manière particulière, et se sont également intéressée au discours de la femme, à travers lequel elle cherche souvent à s'affirmer et à mettre en avant son identité. “La femme cherche souvent à donner le meilleur d'elle-même et sa vision des phénomènes n'est nullement verticale ou transcendantale, mais repose plutôt sur une vision qui a source dans son intériorité et qui est par conséquent davantage claire, profonde et tangible”, estiment les participants. D'autres intervenants ont fait remarquer que l'approche de la femme des arcanes de la vie en matière de création est plus probante, notamment lorsqu'il s'agit d'analyser les souffrances et les espoirs de l'humanité, parce que, ont-ils fait constater, la femme est dotée d'une plus grande sensibilité et elle est plus encline à sonder les secrets humains. Dans ce contexte, la directrice de l'ISADAC, Mme Naïma Harifi a indiqué que ce séminaire, qui s'inscrit dans le cadre des rencontres scientifiques et académiques initiées par l'Institut, s'assigne pour objectifs de tisser des liens forts entre la génération des jeunes créateurs et les femmes pionnières en matière de créativité théâtrale. A ce propos, Mme Harifi a fait allusion à l'artiste Fatima Regragui qui a été célébrée lors d'un documentaire télévisé ayant commenté 40 années de son vécu et de son parcours en matière de créativité théâtrale. Après avoir présenté le premier numéro de la revue “les cahiers du théâtre” paru à l'ISADAC, Mme. Harifi a estimé que la réussite de la conception de l'approche genre de façon générale, et dans le domaine du théâtre de façon particulière, nécessite de faire casser certains tabous au niveau culturel qui voudraient faire admettre que la femme ne peut être un être créatif et que sa production n'est qu'une manière de traduire et d'accompagner l'expérience menée par l'homme. “Dans ces conditions, il devient nécessaire d'explorer la marginalisation que la femme a enduré sur les plans historique et contemporain”, a-t-elle insisté. De son côté, Aatifa Timjerdine, Coordinatrice nationale du réseau “Anarouz”, a souligné l'intérêt de mettre en avant la création féminine et l'approche genre et le rôle que remplit cette dernière, notamment lorsqu'il s'agit de débattre des rôles que joue “le genre et les prototypes, dans leurs relations avec la créativité”. Mme Anissa Drazi (faculté des Lettres et des sciences humaines à Casablanca) a, pour sa part, affirmé qu'en ce qui concerne la question de “la créativité”, la compétition reste souvent circonscrite à cette concurrence exacerbée entre l'homme et la femme, alors que la problématique devait être posée dans d'autres termes à savoir que “la femme est absente tout au long de l'histoire de la création sur les plans artistique et théâtral marquée par des auteurs de théâtre de la dimension de Sophocle, Shakespeare, Racine et Roger Assaf”. Il existe, a-t-elle fait noter, “une carence en matière de créativité féminine dans le domaine du théâtre, malgré la présence indéniable de la femme dans d'autres genres littéraires”. Les travaux de ce séminaire, lors duquel a été rendu un hommage à Mme Touria Jebrane, sont encadrés par des académiciens et des artistes œuvrant dans le domaine théâtral. Les thèmes qui y sont examinés sont intitulés “la femme et le théâtre à travers l'histoire”, “la femme marocaine et la créativité théâtrale les liens et les disparités”, “la femme et la créativité féminine : des voix et des expériences” et “la femme et le théâtre au Maroc : présence masculine ou féminine”.