L'expérience du Maroc en matière de protection des droits de l'Homme a été présentée vendredi à Tunis par Mustapha Iznasni, membre du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH). Intervenant lors d'une rencontre internationale sur la justice transitionnelle, M. Iznasni, ex-membre de l'Instance équité et réconciliation (IER), a souligné la nécessité d'ouvrer pour que les violations des droits de l'Homme commises par le passé ne se reproduisent plus. Evoquant l'expérience du Royaume dans le domaine de la réparation communautaire, M. Iznasni a mis l'accent sur l'importance de tirer les enseignements du passé et de préserver la mémoire collective. S'agissant des actions menées par l'IER en vue de raffermir la culture des droits de l'homme, M. Iznasni a donné un aperçu sur la démarche suivie par l'instance en la matière, évoquant au passage l'indemnisation pécuniaire au profit des victimes ainsi que les réformes entreprises par le Maroc pour tourner la page du passé. Il a ajouté que la réparation communautaire vise entre autres à rétablir la confiance des victimes vis-à-vis des institutions de l'Etat, renforcer la démocratie et promouvoir la culture des droits de l'Homme. Après avoir rappelé l'intérêt accordé par l'IER à la question des droits de la femme, M. Iznasni a passé en revue les programmes de réhabilitation et d'insertion sociale initiés au profit des victimes des droits de l'Homme. L'IER a également mis en place d'autres programmes de développement économique, social et culturel dans le cadre de la réparation communautaire. L'expérience marocaine en matière d'équité et de réconciliation a instauré de nouveaux mécanismes pour la justice transitionnelle au niveau international, a estimé, vendredi à Tunis, le juriste marocain Hamid El Kam. S'exprimant dans le cadre d'une rencontre sur la justice transitionnelle, M. El Kam, conseiller du président du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) et ancien coordinateur exécutif de l'Instance Equité et réconciliation (IER), a ajouté que cette Instance était un mécanisme non judiciaire chargé d'examiner les graves violations passées des droits de l'Homme. Son rôle, a-t-il dit, a consisté en «la réparation, l'indemnisation, la réhabilitation et la réintégration sociale'' des victimes de ces violations, afin de réconcilier les marocains avec leur histoire et poursuivre la libération de leurs énergies. La mission de l'IER dans le domaine de la justice transitionnelle s'inscrivait dans le cadre d'une approche globale ayant pour but d'établir la vérité sur les violations passées, instaurer les fondements pour la non répétition de ces violations et consolider l'édifice de l'Etat de droit et des institutions, a poursuivi le juriste marocain. Lors de cette rencontre organisée par la fondation allemande Konrad Adenauer et la Chaire de l'Unesco pour l'étude comparative des religions à l'Université de Tunis, M. El Kam a souligné que l'IER en tant que mécanisme de justice transitionnelle est le fruit d'une évolution historique, «complexe et difficile, destinée à résoudre les problèmes des violations passées des droits de l'Homme''. L'Instance est aussi le résultat de «luttes, de combats et de débats au sein de la classe politique et des forces vives dans la société civile afin de trouver les moyens à même de résoudre les conflits du passé de manière juste et équitable'', a poursuivi le spécialiste marocain. Dans le cadre de son mandat, a précisé le juriste marocain, l'IER a effectué des recherches, procédé à l'arbitrage et fait des propositions relatives aux graves violations des droits de l'Homme. L'instance a également procédé à une évaluation globale du processus de règlement du dossier de la disparition forcée et de l'arrestation arbitraire, en coordination avec le gouvernement, les autorités publiques, les organisations des droits de l'Homme, les victimes, leurs familles et leurs représentants. L'IER a eu accès aux archives de l'Etat et a collecté les informations et les preuves nécessaires à l'établissement de la vérité, en plus du traitement des demandes d'indemnisation des victimes ou de leurs ayant-droits pour les préjudices subis. L'Instance a aussi fait des recommandations pour la réhabilitation psychique et physique et l'intégration sociale des victimes et pour la solution des problèmes résiduels aux plans administratif, fonctionnel ou juridique. Dans son rapport final, a noté M. El Kam, l'IER a inscrit les conclusions de ses recherches et de ses analyses sur les violations commises et présenté des recommandations et des propositions afin de préserver la mémoire collective, s'assurer de la non répétition de ces violations et restaurer et conforter la confiance dans le règne de la loi et le respect des droits de l'Homme. Le représentant du CNDH a fait savoir que l'IER avait adopté une stratégie prospective et intégrée pour examiner les violations passées des droits de l'Homme, afin de réconcilier les marocains avec leur histoire et établir un diagnostic réel sur la nature, les causes, le contexte et la gravité de ces violations, tout en s'assurant que les drames du passé ne se répètent plus. Pour ce faire, l'IER s'est inspirée des principes du droit international relatif aux droits de l'Homme et du droit humanitaire international relatif à la réconciliation, la réparation et l'établissement de la vérité. Les leçons des expériences nationales et internationales dans ce domaine ont également été prises en compte, a souligné le juriste marocain. Le dépassement des violations passées des droits de l'Homme au Maroc, a estimé M. EL Kam, s'inscrit dans le processus de consolidation de la transition démocratique et de renforcement des droits de l'Homme dans le présent et le futur, relevant que l'adoption de cette approche non judiciaire répond aux principes de l'équité et de la justice, aux spécificités marocaines et à la volonté de contribuer aux normes internationales relatives à la justice transitionnelle. Le juriste marocain a enfin souligné que parmi les objectifs stratégiques que s'est fixée l'IER, figure l'amorce d'un débat et d'une réflexion collective sur les principes de la réconciliation et la promotion des droits de l'Homme et des valeurs de citoyenneté.