Nabil Bousaadi Premières victimes de la révolution « khoméïniste » qui, en mettant fin, en Février 1979, au régime qu'incarnait le Shah d'Iran, Mohammad Reza Pahlavi, et en transférant le pouvoir au clergé chiite, les avait reléguées au dernier rang et contraintes à se cacher derrière un voile, les iraniennes seraient-elles en train de faire leur come-back et de lancer leur contre-révolution pour arracher le pouvoir aux religieux et les confiner, à terme, dans leurs mosquées ? C'est ce que l'on pourrait croire et qui semble se dessiner dans le pays, ces derniers temps, car, après avoir commencé, timidement, à « mal porter » le fichu imposé par la révolution islamique et destiné à leur couvrir intégralement les cheveux, les iraniennes s'étaient mises à en laisser « s'échapper » quelques mèches, tantôt sciemment tantôt par inadvertance. Parmi ces dernières, une jeune kurde de 22 ans, Mahsa Amini, qui avait été arrêtée, en Septembre 2022, par la police des mœurs, pour n'avoir pas porté « correctement » son foulard, est décédée pendant sa garde-à-vue. Que cette mort ait été consécutive à la torture ou pas, ce qui importe c'est qu'elle avait fait tellement de bruit, en Iran et ailleurs, qu'elle avait réveillé les consciences des iraniennes – qui étaient maintenues en hibernation depuis la chute du Shah – et avait donné naissance au mouvement « Femme-Vie-Liberté » (Jin-Jiyan-Azadi) qui avait repris un slogan politique qui avait été lancé par le mouvement national kurde pour en faire, par la suite, le mot d'ordre scandé par l'ensemble des protestataires iraniens au cours des manifestations auxquelles avait donné lieu la disparition de Mahsa Amini. Mais si, jusque-là, tout semblait être « dans l'ordre des choses » car rien ne « débordait » réellement, le « comble » a eu lieu, ce samedi 2 novembre 2024, lorsqu'après avoir été harcelée, par des miliciens appartenant aux Gardiens de la Révolution qui lui reprochaient d'être venue en classe en portant des « vêtements inappropriés », et d'aller, ainsi, à l'encontre de la loi islamique qui impose, aux femmes, un code vestimentaire strict – à savoir, un foulard cachant leurs cheveux et des vêtements amples dissimulant leurs formes – une jeune femme de 30 ans, Ahoo Daryaei, poursuivant des études de Littérature française, à l'Université islamique Azad de Téhéran, a eu les vêtements déchirés au cours de son altercation, plutôt musclée, avec les forces de sécurité qui étaient venus pour la sermonner. Aussi, pour dénoncer le comportement intempestif et éminemment « machiste » des forces chargées du « maintien de l'ordre » au sein de l'Université, la jeune fille a délibérément enlevé ses habits avant de s'asseoir, durant quelques instants, sur un muret, ses longs cheveux au vent, avec, pour seuls vêtements, sa culotte et son soutien-gorge. Quelques minutes plus tard, l'intéressée se leva et traversa le campus, dans cet accoutrement, avant de poursuivre sa « balade » hors de l'enceinte universitaire. Il n'en fallait pas plus, bien entendu, pour que des miliciens appartenant aux « Gardiens de la Révolution » interviennent immédiatement et la jettent, de force, et comme un vulgaire paquet, dans un véhicule de la Police nationale, à l'intérieur duquel elle aurait été violemment battue, d'après le site Amir Kabir. Devenue virale, la vidéo montrant la « promenade » de la jeune femme, avec pour seuls effets vestimentaires son slip et son soutien-gorge et constituant, incontestablement, une « grande première » et un évènement inédit dans cette république islamique iranienne où les femmes sont drapées de noir et les clés du pouvoir détenues par le clergé chiite, a rapidement fait le tour du monde en passant, en boucle, sur toutes les chaînes de télévision que compte la planète. S'agit-il du déclenchement, à l'instigation des femmes, du mouvement qui, à plus ou moins brève échéance, va sonner le glas de la révolution « khoméïniste » et du régime des Mollahs en Iran ? Tout, pour l'heure, semble aller dans ce sens mais attendons pour voir...